La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2016 - Entretien / Nicolas Truong

Interview

Interview - Critique sortie Avignon / 2016 Villeneuve-lès-Avignon Festival d’Avignon. Chartreuse
Crédit photo : Hervé Baudat

Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon / conception et mes Nicolas Truong

Publié le 26 juin 2016 - N° 245

Nicolas Truong retrouve Nicolas Bouchaud et Judith Henry pour un spectacle sur l’interview, confiant aux corps et au jeu le soin d’élucider la pensée à l’œuvre dans ce genre particulier et inclassable.

« L’interview est une danse plutôt qu’un match. »

Comment définir ce nouveau projet ?

Nicolas Truong : Il s’agit d’un spectacle sur l’interview, qui comporte des interviews mais aussi des interviews sur l’interview ! Ce genre est intéressant : il est dominant, il est ce qu’on lit et voit le plus, et pourtant, il n’a jamais été analysé en tant que tel, même s’il existe des manuels pour les écoles de journalisme ou des précis pour apprendre à y répondre, pour les managers et les politiques. On a souvent l’impression que l’interview parle beaucoup tout en ne disant rien ! Avec ce nouveau projet, j’ai voulu questionner la question, interroger le genre. L’interview est une conversation très particulière. Interrogatoire, confession, entretien psychanalytique : ça a à voir avec tout cela, et pourtant, ce n’est pas cela. Il s’agit d’interroger cette relation particulière et les conditions de possibilité pour que l’interview fasse advenir des moments de vérité, factuelle ou existentielle.

Quels matériaux utilisez-vous ?

N. T. : Nous utilisons trois types de matériaux : des interviews d’interviewers, qui racontent ce qui fait que les choses adviennent ou sont ratées, des réflexions sur l’interview, celles de Deleuze ou de Foucault par exemple (le premier refusant le jeu médiatique, le second le déplaçant), et des interviews mainstream ou singulières, celle de Duras par Pivot, celle de Sagan par Desproges, et la dernière interview de Pasolini, accordée quelques heures avant sa mort, qu’il avait lui-même intitulée Nous sommes tous en danger et qui est un modèle d’interview fleuve, longue et débordant du cadre de l’exercice.

Comment passer de la lecture au jeu ?

N. T. : Nous travaillons à montrer le mouvement de la pensée. L’interview est une danse plutôt qu’un match : il faut la conduire ! Nicolas et Judith sont capables de donner corps aux idées, d’accorder une physicalité aux pensées. Il s’agit d’être dans le mouvement plutôt que dans le face-à-face : non pas rejouer les interviews, répliquer les répliques, ce qui exclut le spectateur. Pour être avec le public, il faut retrouver le mouvement qui inclut le lecteur dans sa lecture. On peut alors s’amuser : ne conserver que les réponses, ou les salves de questions, afin de trouver l’énigme qui permet d’élucider ce qui fait que l’interviewé en arrive à dire ce qu’il dit. Même dans les interviews mal faites – volontairement ou non – quelque chose se passe : il suffit de penser à l’extraordinaire désarroi de Sagan face à Desproges ! L’interview idéale a à voir avec la maïeutique. Cela ne signifie pas qu’elle relève de la philosophie, mais elle est l’occasion d’apparition de moments de vérité.

 

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

Interview
du lundi 18 juillet 2016 au dimanche 24 juillet 2016
Festival d’Avignon. Chartreuse
58 Rue de la République, 30400 Villeneuve-lès-Avignon, France

à 18h, le 19 à 14h et 18h. Tél. : 04 90 14 14 14. Durée : 1h30.

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