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La musique Baroque en France

Une lueur dans la crise

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Publié le 10 juillet 2008

Une lueur dans la crise

Le baroque vend plus de disques que les autres répertoires de musique classique. Mais cette situation n’empêche pas certaines dérives.

Le chiffre est sans appel : – 33 % de ventes de disques classiques en France durant le premier semestre 2007. De cette situation de crise, la musique ancienne se sort mieux que les autres répertoires. Alain Lanceron, directeur d’EMI Classics France-Virgin Classics, explique ainsi que son label vend « entre 30 et 40 000 exemplaires d’un disque de musique vocale baroque alors que pour un enregistrement de musique symphonique romantique, on compte entre 5 000 et 10 000 ventes ». Même son de cloche chez Zig-Zag Territoires, dont la directrice de production, Sylvie Brély, affirme « réussir à vendre entre 3 000 et 4 000 disques baroques contre 2 000, péniblement, pour du Fauré ou du Bartok ». Mais pourquoi le baroque fait-il vendre davantage, aussi bien chez les majors que chez les indépendants ‘
« La discographie de la musique ancienne est encore récente, et le répertoire, vaste. Le marché n’est donc pas saturé », remarque Sylvie Brély. C’est d’ailleurs l’un des rares répertoires où les labels osent produire des raretés. Et parfois des miracles se produisent, comme pour l’enregistrement de l’œuvre du méconnu Valentini par l’Ensemble 415 (Zig-Zag), qui a atteint 15 000 exemplaires vendus.
La réussite du secteur tient aussi au renouveau interprétatif. Alain Lanceron remarque qu’avant la révolution baroque, « les ventes étaient timides. Les disques des Paillard ou Kuentz marchaient un peu, mais de façon ponctuelle. L’arrivée des Harnoncourt et Christie a fait appréhender la musique d’une autre manière, engendrant des succès discographiques au détriment de la musique symphonique traditionnelle. »
Autre grand atout du baroque : la voix. La majorité des œuvres de musique ancienne font appel à des chanteurs, et c’est là l’une des clés du succès. L’enregistrement d’airs de Vivaldi (Virgin Classics) par Philippe Jarrousky a ainsi atteint 90 000 exemplaires.
Sylvie Brély explique également que « ce succès du baroque est lié au type de public ». Les aficionados de la musique ancienne se montrent plus ouverts à la nouveauté, alors que pour les autres répertoires, le public reste attaché aux références des monstres sacrés. « C’est une musique pleine de vitalité, et c’est ce que l’on recherche aujourd’hui », poursuit Sylvie Brély.
Le tableau serait-t-il pour autant complètement rose ‘ Rien n’est moins sûr. Pour les maisons de disque, il n’y a pas que des avantages à enregistrer de la musique ancienne. « Ce répertoire est beaucoup plus lourd et plus cher à enregistrer que la musique symphonique traditionnelle, note Alain Lanceron. Car ce ne sont pas des orchestres subventionnés, ce sont des ensembles d’intermittents. Nous faisons ainsi beaucoup d’enregistrements live pour diminuer les coûts. Il faut aussi trouver des sponsors, des aides extérieures. » C’est ainsi que fleurissent sur les pochettes de disques les sigles Adami, Scpf, Scpm… autant d’organismes d’aides qui peuvent financer jusqu’au tiers du coût de l’enregistrement. Par ailleurs, Zig-Zag a longtemps bénéficié du soutien du secteur privé, avec le mécénat de la Société Générale. A noter que Sylvie Brély a été cadre dans la banque de la Défense.
 
Royalties non payées
 
Ces aides n’empêchent toutefois pas certains labels spécialisés dans la musique ancienne de rencontrer de sérieuses difficultés financières, comme Alpha, récemment proche de la faillite. « Il suffit de deux enregistrements commercialement ratés et c’est le début de la fin », commente un spécialiste du secteur.
Du côté des artistes, le succès discographique baroque n’est pas toujours source de profits. Les cas sont légion où les musiciens ne sont pas payés par les maisons de disque. Certains vont même jusqu’à engager des poursuites judiciaire contre leurs label qui ne leurs versent pas les royalties (comprises généralement entre 2 et 8% du prix du disque). « Ces pratiques existent car les musiciens sont prêts à tout accepter, puisque le disque constitue un moyen incomparable de promotion », analyse le claveciniste Bruno Procopio, qui a lancé il y a quelques mois son propre label, Paraty. « Je souhaite pouvoir maîtriser tous les paramètres artistiques, ne pas être obligé de jouer tel répertoire avec tel artiste. Par ailleurs, j’ai ainsi la possibilité d’un retour financier », poursuit Bruno Procopio. L’autoproduction est un phénomène de plus en plus courant dans le baroque, si l’on en juge par la création des labels de Ton Koopman ou de Jordi Savall.
Autre piste de développement : le numérique. Sylvie Brély se montre enthousiaste en expliquant que « sur I Tunes, l’enregistrement des concertos de Bach par Amandine Beyer était premier des ventes classiques en Europe ». Pour autant, les parts de ce marché restent globalement faibles, le numérique représentant entre 3 et 5 % des ventes totales. Alain Lanceron remarque en outre que « le public du baroque est plus jeune et peut donc être plus intéressé par le téléchargement ».
Quant au téléchargement illégal, les directeurs de labels peuvent être rassurés. Vivaldi, Haendel ou Bach circulent encore rarement sur les sites de peer-to-peer. Pour l’instant…
 
A. Pecqueur

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