Le Parlement de musique et La Chapelle rhénane
©Le Parlement de musique, ensemble dirigé par Martin Gester. Photo : DR
Le Parlement de musique, ensemble dirigé par Martin Gester. Photo : DR
Publié le 10 juillet 2008
Le Parlement de musique et La Chapelle rhénane
Ancrés dans l’espace rhénan, les deux ensembles phares de la musique ancienne en Alsace, fondés respectivement en 1990 et 2001 proposent des approches sensiblement différentes de leurs répertoires.
Martin Gester
Directeur artistique du Parlement de musique
« Le Parlement de musique est né à la jonction de l’enseignement et de la volonté d’interpréter, à une époque de spécialisation où l’on oublie que Monteverdi et Bach s’intéressaient à tout, depuis la facture d’orgue jusqu’à l’enseignement du latin. Il faut aujourd’hui renouer ces liens au risque de perdre de vue l’objet de la musique. La musique du xviie siècle opère une synthèse entre la musique, la danse, la déclamation, la vocalité, la virtuosité. Mêmes les Leçons de ténèbres de Couperin, cette musique apparemment en prose, ni dansée ni déclamée ni versifiée, retombe sur ces mêmes schémas. C’est pourquoi je me méfie des prétentions à l’authenticité : la fidélité au son « d’époque » a amené à idolâtrer les instruments alors que l’esprit des œuvres est ailleurs. Il faut aussi recréer le contexte des œuvres : enchaîner les parties d’une messe, comme celle de Jean Denoyé que nous venons d’enregistrer, n’a aucun sens. Il ne s’agit pas de reconstituer les prières mais il faut trouver quelque chose qui en fasse office. J’ai ainsi fait l’arrangement, comme on le faisait à l’époque, d’un motet de Rameau et écrit une passacaille « pour les instruments au lieu des orgues » comme disait Charpentier. La restitution d’une œuvre passe par sa mise en valeur : ce que j’ai fait avec Denoyé, c’est l’intervention que faisait, à l’époque, un maître de chapelle. »
Benoît Haller
Directeur musical de La Chapelle rhénane
« Avec les Musikalische Exequien que nous venons d’enregistrer se termine notre « trilogie » discographique consacrée à Schütz et nous allons pouvoir nous orienter vers un autre répertoire, Buxtehude et Bach notamment, qui constitue un aboutissement. Après les cantates profanes [données le 23 novembre à la Cité de la musique] l’idée est d’aller vers les Passions en les replaçant dans un cadre plus large que celui de la liturgie, en adéquation avec le monde actuel. Dans les Passions, chaque personnage est un archétype : celui qui se sacrifie, celui, qui trahit, celui qui renie, celui qui juge… Cela correspond bien à l’idée que je me fais de l’interprétation et de notre rôle vis-à-vis du public : il faut rechercher la spontanéité, l’émotion, l’expression, plutôt qu’une « authenticité » qui conduit à des interprétations schématiques. Pour ce projet, nous avons la chance de bénéficier du soutien du Centre International des Chemins du Baroque du Couvent de Saint-Ulrich à Sarrebourg, qui participera ainsi que la Fondation Royaumont à la partie pédagogique de ce travail sur les Passions (Saint-Jean en 2008 et Saint-Matthieu en 2009) mises en scène par Gerd Heinz, homme de théâtre complet. »
Propos recueillis par Jean-Guillaume Lebrun