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« INK » de Dimitris Papaioannou, une œuvre chorégraphique et picturale marquante

« INK » de Dimitris Papaioannou, une œuvre chorégraphique et picturale marquante - Critique sortie Danse Paris Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt
Crédit : Julian Mommert Dimitris Papaioannou dans Ink

Théâtre de la Ville Sarah Bernhardt / Chor. Dimitris Papaioannou

Publié le 27 février 2024

Entre apocalypse et érotisme, Dimitris Papaioannou livre une œuvre chorégraphique et picturale marquante.

Ink (encre) est un drame onirique, un voyage fantastique dans les fantasmes de Dimitris Papaioannou et ses désirs en clair-obscur. Une œuvre troublante, peut-être la plus introspective du chorégraphe, entièrement tournée vers une sorte de cauchemar psychanalytique, qui réunit un homme mûr, entièrement vêtu de noir (Dimitris Papaioannou), et un jeune éphèbe nu (Šuka Horn). Défile alors toute une panoplie de visions fragmentaires qui nous parlent de fascination mutuelle, de double, de filiation, de paternité, de lutte, de monstres tapis dans l’ombre, de Frankenstein, de soumission, de domination, des dieux, des hommes, de première rencontre, d’attraction irrépressible, d’apprivoisement, d’enfant à venir, d’animal, de concupiscence, de curiosité et même de répugnance. Le tout placé sous le signe de la pieuvre comme symbole d’une « sexualité intense », car, comme le dit Papaioannou, le désir se métamorphose en œuvre spirituelle « comme l’encre, ce sperme noir du poulpe, se transforme en peinture ou en littérature ».

Encre sympathique

Dans ce duo d’une sensualité torride assumée, se noue une quête existentielle sous les jeux d’eau infiniment travaillés qui vont de l’averse torrentielle aux ressacs les plus noirs. L’eau ou l’encre commandent tout. Pluie, vapeur, lac, mer, sueur se teintent d’ombre grâce à un jeu de lumière magistral, comme l’encre, qui ne dit rien quand elle est inerte, mais révèle sous la lampe tous nos secrets quand elle est « sympathique ». Le créateur et sa créature s’affrontent et se confrontent, s’arriment l’un à l’autre, s’aiment ou se quittent. L’homme nu existe-t-il ou n’est-il que fantasme ? Dans cette pénombre caverneuse, le sentiment de solitude finit par tout submerger. Ink avec ses images d’une puissance visuelle extraordinaire, ces jets qui se dressent et retombent en fumée, ces puits de lumière, nous parle aussi de deuil, d’abandon, de séparation, de perte irrémédiable, comme le suggère la fin ou l’homme se retrouve seul. Avec sa pieuvre.

Agnès Izrine

A propos de l'événement

INK
du lundi 13 mai 2024 au mercredi 15 mai 2024
Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt
Place du Châtelet, 75004 Paris

à 20h. Tél. : 01 42 74 22 77. Durée 1h05. Spectacle vu le 24 septembre 2023 à la Biennale de Lyon.

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