Circa, Le Festival du cirque actuel

À voir la programmation du festival, on peut d’abord se réjouir de ce que la crise sanitaire n’a pas eu raison des grandes formes, célébrations circassiennes hautes en couleur et en énergie, propres à communiquer une grande dose de bonne humeur à des centaines de spectateurs à la fois. Tel est certainement PIC du Surnatural Orchestra et du Cirque Inextremiste, spectacle démesuré qui conjugue cirque et musique jazz avec un grain de folie. On constate que les autres grandes formes mettent en piste la joie, mais aussi la nécessité de la résilience : trouver l’espérance, ensemble, malgré l’absurdité du monde (23 fragments de ces derniers jours, Troisième Cirque), surmonter les obstacles (Barrières, Cie Bêstîa), accepter le risque et la faillibilité (Foutoir Céleste, Cirque exalté). Cette place faite à la vulnérabilité, qui peut se conjuguer avec tendresse et poésie (L’empreinte, Cie L’attraction Céleste), on en trouve les échos dans les spectacles de clown, tel Chaos, Courroux et Cataclysme de la Cie Et vous en vivez!.

Un cirque qui prend en charge le politique comme le poétique

Les auteurs et autrices de cirque veulent prendre en charge les questions sociétales qui traversent l’époque, sans renoncer à l’ambition esthétique. Il peut s’agir des violences sexuelles (La Boîte de Pandore, Cie Attention fragile), de la crise écologique (Le Chant du vertige, Cie Lapsus), de la place des femmes dans l’art (Scènes étranges dans la mine d’or, Studio Phantôm), des violences policières… Le cirque contemporain peut porter un discours sur le monde. Ce qui ne l’empêche pas de proposer aussi des épures d’une beauté et d’une poésie folles (La lévitation réelle, Cie L’Immédiat), ou de créer des objets surréalistes et profondément touchants (Garcimore est mort, Gaël Santisteva, ou Searching for John, Stefan Kinsman). Parfois aussi, il vient chambouler nos repères à l’aide de nouveaux objets de cirque qui réveillent notre regard (Out of the blue, Frederi Vernier et Sébastien Davis-VanGelder, ou TERCES, Johann Le Guillerm). Et il est rarement aussi puissant que quand il met en jeu les corps, de façon simple mais troublante, au plus proche du public (BITBYBIT, Collectif Malunés). Le cirque est riche de sa diversité… et le festival de CIRCa en est le reflet.

Mathieu Dochtermann