CIRCA, festival du cirque actuel, édition 2021

Des vents contraires soufflent sur le cirque : annulation des tournées, fragilité des grandes formes, réglementation aléatoire des chapiteaux, l’épidémie chahute le secteur. Stéphanie Bulteau, directrice de CIRCa, tient bon le cap et propose un festival rééquilibré, pour que les propositions soient mieux réparties sur la durée d’un festival qui s’achève désormais le samedi. Étant donné le contexte, il y a moins de compagnies étrangères qu’à l’ordinaire, mais on a le plaisir de trouver à l’affiche les australiens virtuoses de Gravity and Other Myths. Le festival ne renonce pas à proposer des grandes formes, comme La bande à Tyrex, même si Stéphanie Bulteau confie qu’elle sent dans la création récente “une grande tendance au solo et au duo”. On retrouve en outre quelques spectacles créés la saison passée, qui n’avaient pas pu rencontrer le public : c’est l’occasion de découvrir l’ambitieux Les Hauts Plateaux de Mathurin Bolze, ou Time to tell de Martin Palisse où l’artiste jongle pour raconter sa vie avec la mucoviscidose. Le festival confirme son soutien aux écoles de cirque, notamment avec la reprise de C’est pour toi que je fais ça ! par les élèves du CNAC.

Les créatrices à l’honneur

Au milieu d’un programme foisonnant, on repère avec bonheur quelques-unes des créatrices les plus captivantes du cirque contemporain. Chloé Moglia présente Bleu Tenace, où elle dirige Fanny Austry dans ses évolutions sur une structure-sculpture : une suspension qui ne s’interdit pas l’irruption de passages plus dynamiques. Mélissa Von Vépy est programmée avec Les Flyings, une exploration du trapèze ballant par l’absurde, un tableau poétique somptueusement mis en lumière. Sont également programmées des créatrices plus jeunes, que le festival offre à découvrir. Ainsi, Camille Chatelain propose dans No Rest For Lady Dragon une œuvre hybride, sorte de concert de cirque, charge anti-patriarcale sans concession. Alice Barraud, également, accompagnée de Raphaël de Pressigny à la musique, raconte la reconquête de sa pratique circassienne après une blessure traumatisante. Avec Time to tell, ce dernier spectacle illustre une tendance contemporaine dont le festival se fait témoin : celle de l’apparition d’un cirque documentaire ou biographique.

Mathieu Dochtermann