Hantologie

Le tandem avait confirmé, en 2010, les bases solides d’une collaboration entre danse et musique, lui à la chorégraphie, elle aux platines (Accidens). Aujourd’hui, cette nouvelle pièce élargit le cercle des participants : non seulement en invitant d’autres créateurs, mais en inventant un rapport différent avec le public qui, d’une certaine manière, fait partie du spectacle. Samuel Lefeuvre est rejoint par la danseuse Florencia Demestri – ils ont en commun d’avoir travaillé avec Lisi Estaras et Michèle Anne De Mey – tandis que Raphaëlle Latini compose avec Mathias Delplanque. Au milieu, grande place est faite à un collaborateur atypique : Manuel Rozoy a la particularité d’être « game designer », autrement dit un spécialiste du jeu, qu’il soit de société ou vidéo.

Morceaux choisis

Ensemble, ils vont creuser l’idée de processus menant à la représentation, à la façon d’un rituel. En l’interrogeant par la mise en place de nouvelles règles du jeu, ils en font resurgir les codes. Tout est compris dans ce titre, dont le H déplacé nous fait hésiter entre une pièce hantée ou une anthologie. Car il est question de possession dans ce rituel, de transe, de répétitions et de boucles, au cœur même du lieu théâtral qui est pris en compte dans le processus. Celui-ci utilise matière et archives, que le groupe Entorse collecte, n’hésitant pas à affirmer qu’il fait les « poubelles du spectacle vivant » ! Dans la foulée, il convoque les gestes enfouis ou délaissés, les gestes qui jalonnent et marquent profondément l’Histoire de la danse. Tous ces restes sont la matière presque informe d’Hantologie, et marquent l’esprit aventureux du duo Lefeuvre Latini, qui fait de la scène un espace visuel et sonore propice à l’expérimentation.

Nathalie Yokel