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Focus -277-Festivals réseau Spedidam

Pour que toute écoute génère des droits, y compris via internet…

Pour que toute écoute génère des droits, y compris via internet… - Critique sortie Jazz / Musiques

Publié le 30 mai 2019 - N° 277

Directeur administratif et financier – gérant de la Spedidam, Guillaume Damerval évoque les Festivals du réseau Spedidam, mais aussi les nouveaux enjeux auxquels la société de répartition des droits des artistes-interprètes est aujourd’hui confrontée, en particulier avec le développement des nouveaux modes d’écoute musicale sur internet.

L’audiovisuel reste-t-il pour la Spedidam un terrain de conquête pour la protection des droits de artistes-interprètes ?

Guillaume Damerval : Aujourd’hui, beaucoup de choses sont en place et fonctionnent bien comme la « rémunération équitable », la « copie privée » ou encore l’exercice du droit exclusif qui fait que lorsqu’une structure utilise un enregistrement, nous percevons des droits qui sont reversés aux artistes-interprètes. Dans le cadre d’un spectacle, d’un film, ou d’une émission de radio ou de télévision, l’utilisation d’un phonogramme du commerce, c’est-à-dire d’un disque, génère ainsi des droits pour les artistes. C’est ce qu’on désigne comme une utilisation « secondaire ». Dans les propositions que nous formulons, nous mentionnons un point important : l’extension de la « rémunération équitable » à toute diffusion.

C’est-à-dire l’écoute musicale via internet ?

Guillaume Damerval : Aujourd’hui, lorsque le public regarde une vidéo sur YouTube ou écoute un morceau sur Spotify ou Qobuz, il faut savoir que les artistes-interprètes ne sont pas rémunérés. Il est essentiel que le grand public le sache. Les producteurs et l’industrie phonographique disent : « mais si, on paye les artistes ! ». Mais il s’agit uniquement des artistes principaux de grande renommée qui ont pu négocier en amont. Les artistes qui accompagnent cet artiste principal, eux, n’ont rien du tout : c’est donc l’immense majorité des artistes qui n’a rien.

Il y a donc urgence…

Guillaume Damerval : Il semble possible que dans la future loi dite « loi audiovisuelle » – celle qui comprendra peut-être une nouvelle organisation de France Télévision et de Radio-France -, il puisse y avoir des articles de lois permettant aux artistes-interprètes de percevoir des droits nouveaux sur tout ce qui est « à la demande » : streaming, téléchargements ou écoutes sur YouTube, qu’il s’agisse d’abonnements payants ou d’accès gratuit. Cette loi semble devoir être le seul véhicule législatif du quinquennat. Si on n’obtient rien dans cette loi, malheureusement, ces enjeux seront reportés à un autre quinquennat.

Le rôle des équipes et des experts de la Spedidam est donc de se battre sur ces problématiques et de peser sur les décisions politiques…

Guillaume Damerval : Les 24 membres du Conseil d’Administration ont effectivement une action politique, notamment dans le cas du gérant, du président et de la direction juridique dont le rôle est de rencontrer les parlementaires et de les sensibiliser à ces problèmes. Et je dois dire qu’ils sont vraiment très à l’écoute, ce qui est assez agréable, à l’image de nos échanges avec Bruno Studer, le président de la commission Culture et Education de l’Assemblée Nationale avec qui cela se passe vraiment très bien. La musique génère des nombres de vues très importants, qui génèrent des recettes publicitaires. Il y a là une économie extrêmement importante, mais que l’on ne connaît pas. Nous avons besoin de chiffres. Nous voulons que Google, Apple et consorts partagent un peu « le gâteau » et accordent une rémunération aux artistes sans lesquels ces musiques n’existeraient pas. C’est notre combat, notre cheval de bataille.

« L’objectif est d’avoir un festival par département, en traversant tous les départements de France au fil des ans. »

Vous avez évoqué le volet « copie privée » des ressources de la Spedidam. De quoi s’agit-il exactement ?

Guillaume Damerval : Un phonogramme du commerce peut être copié sur un smartphone ou une clé usb. Le public, par la loi de 1985, a le droit de faire cette copie pour un usage privé, et en achetant ce support paye une part qui va à la « copie privée ». Par exemple, pour l’achat d’un smartphone, entre 4 et 14 euros sont perçus par Copie France selon la capacité de stockage de l’appareil. 75 % de cette somme ira aux créateurs (artistes, producteurs et auteurs-compositeurs), 25 % ira à l’aide à la création de spectacles vivant, à la formation d’artistes et à l’aide au spectacle vivant.

Est-ce avec cette part que vous menez cette action forte en faveur des festivals ?  

Guillaume Damerval : Nous avons différents programmes d’aide au spectacle vivant, dont en effet un dispositif de festivals labellisés « Réseau Spedidam » que nous avons décidé de créer il y a une dizaine d’années. Aujourd’hui 14 manifestations sont en place. Selon notre charte, la ville apporte 30.000 euros et nous 100.000 que l’on verse de manière dégressive pendant 5 ans, le temps de laisser à d’autres partenaires le soin de prendre le relais. Mais nous ne retirons jamais complètement notre aide. Nous restons des partenaires !

La famille de vos festivals s’agrandit-elle ?

Guillaume Damerval : Pour le moment, nous avons deux petits nouveaux cette année : Eole Factory et Musique en Avre. L’objectif est d’avoir un festival par département, en traversant tous les départements de France au fil des ans. Il est à nos yeux crucial de s’inscrire dans le territoire pour que les festivals soient pérennes. Les concerts de l’après-midi sont offerts pour favoriser l’accès des familles aux concerts. Les concerts du soir eux sont payants mais toujours très abordables. L’intérêt est aussi de présenter dans ces programmations nos artistes « Génération Spedidam ».

D’autres initiatives dans le domaine des festivals ? 

Guillaume Damerval : Il y a une autre belle nouveauté cette année : une collaboration avec les Théâtres du Collège de la Salle dans le festival Off d’Avignon. La Spedidam devient un partenaire fort de ce théâtre important pendant tout le festival. Nous étions et nous restons par ailleurs très présents à Avignon où nous aidons de nombreuses compagnies.

 

Propos recueillis par Jean-Luc Caradec

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