Oxmo Puccino & Yaron Herman en tête-à-tête

À ma gauche un rappeur aux talents littéraires reconnus, rodé depuis quelques années aux collaborations avec les musiciens de jazz, depuis les Jazz Bastards, qui l’avaient accompagné pour ouvrir son « Lipopette Bar » (2006) à Ibrahim Maalouf, Erik Truffaz ou Vincent Ségal, qui lui ont donné la réplique depuis. À ma droite, un pianiste rompu à l’improvisation, qui vient de publier un opus en solo mais aussi un livre sur le « déclic créatif » dans lequel il développe une « méthode » sur la manière de travailler sa propre créativité. Fort de sa capacité à tisser des mondes sonores, Yaron Herman habille les paroles d’Oxmo Puccino, épouse sa scansion, accompagne ses lignes, à mesure que le rappeur revisite quelques-uns de ses textes.

Une rencontre stimulante

Initialement formé en 2016 à la faveur d’un projet européen consacré aux textes de Shakespeare, le duo assume une forme de dépouillement et d’imprévisibilité, dans un échange en tête-à-tête poétique qui sort le rappeur de ses canons habituels, « obligé de naviguer selon le courant que [Herman] impose » comme Puccino le dit lui-même. Guidé par les harmonies de Herman, Oxmo remodèle son répertoire, jusqu’à parfois le redécouvrir dans l’instant de la scène. Adepte de ces rencontres avec des interprètes qui ne sont pas de son monde — de M à Benjamin Epps — qu’il aime autant déstabiliser que caresser, Yaron Herman transforme le piano en un orchestre sur lequel les rimes d’Oxmo Puccino refleurissent.

Vincent Bessières