Ophélie Gaillard interprète Brahms

Quand les « Victoires de la Musique » désignent Ophélie Gaillard comme « révélation soliste instrumentale » de l’année 2003, la violoncelliste, jeune lauréate du Conservatoire de Paris, a déjà montré sa curiosité en parcourant largement le répertoire de son instrument. Elle trouve ainsi à s’exprimer dans les Suites pour violoncelle seul et la Sonate pour violoncelle et piano de Benjamin Britten qu’elle enregistre avec la pianiste Vanessa Wagner. Mais dans le même temps, la passion de la musique baroque qui l’avait poussée à étudier auprès de Christophe Coin l’amène à côtoyer, sur instruments d’époque, la jeune génération des ensembles spécialisés. En 2005, elle franchit le pas et fonde l’ensemble Pulcinella qui immédiatement s’illustre avec un enregistrement des Sonates de Vivaldi puis un disque consacré à Boccherini.

À la lumière du baroque

C’est à la lumière de ces expériences musicales menées avec passion qu’Ophélie Gaillard se consacre à l’interprétation du répertoire romantique. Dernier en date, l’enregistrement des deux Sonates pour violoncelle et piano de Brahms est de bout en bout habité par la sonorité éblouissante de son instrument, un violoncelle de Francesco Goffriller de 1737 prêté par son mécène. Ce qui frappe avant tout, c’est la justesse des intonations et des nuances. Dans l’Allegro initial de la Première sonate en mi mineur, le phrasé, l’expressivité absolue et sans outrance portent la marque d’une interprétation longuement mûrie et nourrie à la fréquentation du baroque – un répertoire qui, on l’entend ici très clairement, a contribué à donner un nouveau souffle, une imagination retrouvée à la musique de chambre. L’esprit du menuet du deuxième mouvement de la même sonate  aura été rarement mieux compris que sous l’archet d’Ophélie Gaillard. La Deuxième Sonate joue davantage d’un élan romantique plus habituel, mais avec quelle puissance et quelle coloration ! En cela, Ophélie Gaillard est aidée par l’accompagnement, d’une clarté toujours parfaite, de Louis Schwizgebel-Wang au piano. Encore peu connu en France, ce jeune pianiste de vingt-cinq ans, qui a enregistré pour le label Aparté un disque consacré à Schubert, Liszt et Ravel (à paraître à l’été 2013), montre une hauteur de vue stupéfiante. Ce magnifique album Brahms, qui devrait s’imposer comme une référence moderne, est complété par le Trio pour clarinette, violoncelle et piano op. 114 avec la participation du clarinettiste Fabio Di Càsola.

Jean-Guillaume Lebrun

1 CD Aparté AP053

Label Aparté, 1 rue Paul Bert, 93500 Pantin. Tél : 06 12 82 18 67. Site internet : http://www.littletribeca.com