Odyssées en Yvelines, édition 2022

Tous les deux ans, le festival Odyssées en Yvelines irrigue le département en petites formes conçues par de grands artistes. A destination du jeune public, des spectacles conçus pour être facilement transportables se glissent dans les écoles, investissent les bibliothèques et autres centres sociaux et foyers ruraux. Ils seront six, et pas des moindres, créés par des artistes protéiformes et souvent décalés qui n’ont pas oublié ce que c’était que d’être un enfant. Un exemple, David Lescot avec Depuis que je suis né mettra en scène un gosse de six ans (joué par un adulte) qui entreprend déjà d’écrire son autobiographie. L’idée rigolote nous dit aussi que la petite enfance a ses étapes que l’adulte a tendance à ramasser en une seule catégorie. Si David Lescot est un habitué de l’adresse aux jeunes, Claire Diterzi, chanteuse et compositrice hors normes, se consacrera pour la première fois au jeune public avec Puisque c’est comme ça je vais faire un opéra toute seule qui incitera, elle l’assure, à l’émancipation des enfants via la force de révolte que peut véhiculer la musique.

Mieux comprendre de quoi nous sommes faits

Pas moins déjantée, Nicole Genovese adore la cuisine, les mots et l’humour, surtout s’il est au 36ème degré. Dans Bien sûr oui ok, un comédien fera une génoise en direct et parlera philosophie avec une bonne dose d’absurde dans sa recette. Plus sombre, Baptiste Amann a écrit le récit d’une petite fille qui métamorphose son lit en cabane, en bateau, en tapis volant pour mieux fuir sa réalité. Jamais dormir raconte ainsi comment la nuit ouvre sur la fantasmagorie quand le sommeil échappe.  Voyage toujours mais dans le temps avec Dissolution, texte écrit par Catherine Verlaguet et mis en scène par Julia Vidit. Un vieil homme vient confier à des enfants ses souvenirs et des secrets avant de disparaître. Spectacle sur la transmission, il fait écho à Et si tu danses conçu par Marion Lévy. Là, un adulte qui vient de faire le tour du monde cherche la boîte, où, quand il était petit, il avait caché les choses qui lui étaient importantes. Le spectacle interactif et dansé rappelle que le plus grand risque que court l’adulte est peut-être d’oublier l’enfant qu’il a été. Ce pont entre les âges qui permet de mieux comprendre de quoi nous sommes faits, cette nouvelle édition d’Odyssées le bâtira sans nul doute. On l’a dit, les artistes de cette édition n’ont pas oublié leur enfant intérieur. Rien de mieux pour que l’art ancestral du théâtre se remette à parler aux jeunes générations.

Eric Demey