Marcel Bluwal, témoin des premières amours

Publié le 10 mai 2007

A la fois homme de télévision et homme de théâtre, Marcel Bluwal a réalisé
des adaptations du théâtre au petit écran qui demeurent exemplaires et
mémorables dans les annales cathodiques.

Vous avez assisté à l’évolution des rapports entre théâtre et télévision.

Marcel Bluwal : Je suis le témoin de la naissance de la télévision et
j’ai mené parallèlement une carrière d’homme de théâtre et une carrière d’homme
de télévision. Il est évident que depuis ses débuts, la part du théâtre à la
télévision s’est fortement réduite. Alors qu’au début, la télévision a vécu du
théâtre, dès que les ?uvres originales sont arrivées, le débat s’est instauré
sur la place à laisser au théâtre et les dramatiques ont peu à peu disparu au
profit d’un système de captation, comme dans Au Théâtre ce soir dans les années
60. A partir des années 70, les captations elles-mêmes ont été réduites, jusqu’à
quasi disparaître. Une représentation théâtrale est un phénomène unique et je
suis assez d’accord avec l’idée selon laquelle la captation est une erreur en
soi, mais ce pis-aller est nécessaire pour permettre la découverte. En 1965, à
l’époque de Don Juan, j’étais contre la captation, mais aujourd’hui, je
la considère davantage comme un mal nécessaire.

« Il faut que la télévision parle davantage qu’elle ne le fait du
théâtre. »

Comment pensez-vous qu’on puisse populariser le théâtre à la télévision ?

M. B. : Je ne regrette pas le passé et je ne passe pas mon temps à me
pencher sur lui, mais il est évident que le théâtre dans son cadre de dramatique
en direct ou d’adaptation comme je l’avais fait par exemple avec Don Juan
ça n?existe plus et ça n?existera plus. Il faut bien sûr développer la place du
théâtre à la télévision mais sans doute sous d’autres formes. Il faut que la
télévision parle davantage qu’elle ne le fait du théâtre : le vrai problème,
c’est celui de la promotion de cet art. Il y a des émissions de variétés, des
émissions entièrement consacrées au cinéma : ce n?est pas le cas pour le
théâtre. Pour promouvoir le théâtre, il ne faut pas se contenter de diffuser des
petits bouts d’extraits ou de quelques interviews dans les journaux télévisés
mais mettre en place une vraie politique de promotion. C’est le rôle et le
devoir des chaînes nationales de passer outre les hésitations et les frilosités
de ceux qui estiment que le théâtre intéresse moins le public que les autres
formes artistiques. Il ne faut pas oublier que le théâtre est le laboratoire de
tous les moyens d’expression.

Propos recueillis par Catherine Robert