« L’Uomo femina » de Vincent Dumestre mis en scène par Agnès Jaoui

Deux naufragés débarquent sur une île où les femmes tiennent le pouvoir et les hommes se font beaux et obéissent docilement. La princesse Cretidea s’éprend de l’un des voyageurs, Roberto, qui refuse de se soumettre à ses règles et la convertit au patriarcat. Cela fait quelques années que Vincent Dumestre souhaitait monter cet opéra aux résonances étonnamment contemporaines, né de la rencontre en 1762 du prolifique Baldassare Galuppi et de son librettiste Pietro Chiari. « L’opéra-bouffe est un cadre artistique et musical qui autorise la satire et permet, en imaginant un autre monde, de pousser assez loin des idées philosophiques. Celles de Chiari sont clairement révolutionnaires : c’est un écrivain féministe qui remet en question la place des femmes dans la société de son temps. Bien sûr, on peut être un peu déçu du revirement final, quand tout rentre dans l’ordre acceptable pour la société de l’époque. Mais le librettiste conclut avec malice : « Mais qui bien raisonne, et qui a bon flair, peut comprendre sans hésitation ce que l’Auteur a voulu dire ».

Classicisme et esprit baroque

Pour mettre sur pied cet Homme femme, Vincent Dumestre a travaillé sur l’unique manuscrit conservé à Lisbonne de cette musique vive et libre, « qui entre dans le classicisme tout en se souvenant de l’esprit baroque du théâtre bouffon ». Au moment de débuter le travail de production, le directeur artistique du Poème Harmonique se réjouit de collaborer avec Agnès Jaoui, « une femme de théâtre sensible, amoureuse de l’art lyrique et très à l’écoute des chanteurs ». La distribution est à la hauteur de cette redécouverte avec Eva Zaïcik, Lucile Richardot et Victoire Bunel dans les rôles de la Princesse et de ses ministres, et Victor Sicard et François Rougie dans ceux des naufragés.

Jean-Guillaume Lebrun