Le Quatuor Béla autour de Moondog : “Good Road to follow”

C’est un spécialiste de Moondog, Amaury Cornut, qui a contacté les Béla pour leur proposer de jouer un Quatuor en ut majeur inédit du compositeur américain. Après en avoir interprété en concert un mouvement, les musiciens français ont choisi de faire redécouvrir l’ensemble de la partition de cette figure inclassable, vue comme le précurseur du minimalisme répétitif. Pour Paul-Julian Quillier, l’altiste de l’ensemble, « derrière l’apparente simplicité de son écriture tonale, c’est une pièce pleine de surprises. En la travaillant, on découvre toute la subtilité de passages harmoniques exigeants pour la justesse et la finesse d’un contrepoint que Moondog maîtrisait à la perfection. Le deuxième mouvement est une Romance au thème romantique faussement naïf, et le finale, un Vivace aux jeux rythmiques imbriqués dans une mesure à cinq temps. »

Éclectismes de la modernité américaine

Dans le panorama éclectique Good Road to follow, des pages prolongent ce dépouillement, comme Structures de Morton Feldman et Stringsongs de Meredith Monk. Mais le programme relie surtout le quatuor de Moondog à des esthétiques qui sont à ses antipodes. Harry Partch trouve son inspiration dans l’archéologie pour Two studies on ancient Greek scales. Les quatuors de  Ruth Crawford Seeger et Conlon Nancarrow s’aventurent dans les confins de l’atonalité et du langage parlé. Franck Zappa combine des rythmes complexes dans Black page, et le langage très dense de Cat O’Nine Tails de John Zorn se nourrit du jazz. « Une telle diversité permet d’appréhender toute la palette des gestes sonores du quatuor », dans la lignée du projet porté par le Quatuor Béla qui, dans le cadre du centième anniversaire d’une des dernières légendes vivantes de la musique contemporaine, vient d’enregistrer une intégrale de la musique pour quatuor de Kurtag qui sortira en février 2026.

Gilles Charlassier