Lalogiqueimperturbableduverbefou

« Petite, j’adorais m’asseoir sur une place, écouter les gens sans les regarder et m’amuser ensuite à deviner qui avait pu prononcer les phrases entendues. Comme Des gens, montage inspiré de films de Raymond Depardon que j’ai créé en 2008, mon nouveau spectacle relève de ce jeu-là. De ce goût pour le surréalisme qu’exprime très bien la phrase de La Compagnie des spectres de Lydie Salvayre que j’ai choisie pour titre, sans espaces entre les mots : « la logique imperturbable du verbe fou ». Ayant aussi toujours été intéressée par ce qu’on appelle la folie, l’idée d’un montage de textes sur le sujet a progressivement fait son chemin jusqu’à aboutir à cette création. Cela a pris deux ans. Durée pendant laquelle j’ai rassemblé des matériaux qui m’ont touchée à un moment ou à un autre de ma vie : des textes de Tchekhov, quelques phrases de Shakespeare, des extraits de documentaires, des images de Lewis Carroll ou encore un entretien avec l’humoriste Zouc.

Éloge de la fantaisie

J’avais depuis longtemps envie de travailler avec de jeunes comédiens. C’est bouleversant, la jeunesse, et ça permet d’aborder des problèmes graves avec grâce et légèreté. Âgés de vingt-et-un à vingt-quatre ans, Antonin Chalon, Camille Constantin, Rémy Laquittant et Marie Petiot sont formidables. Formés à des disciplines diverses qui vont de la musique au clown, en passant par l’acrobatie, ils forment un quatuor surprenant. À la fois fragile et d’une grande liberté. Je trouve qu’il y a un appauvrissement du jeu chez les nouvelles générations : très vite, la fantaisie et la fragilité sont censurées au profit d’un comportement régi par les règles de la responsabilité. Lalogiqueimperturbableduverbefou prône la liberté de faire et de dire autrement et pose la question des frontières entre poésie et folie. Cette pièce est au fond une variation sur le déséquilibre. Une performance dont les situations hyperréalistes créent du surréalisme ».

Propos recueillis par Anaïs Heluin