La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -139-Les Pays de la Loire en Avignon Entre Loire et Rhône, au confluent des talents

Entretien : Pascal Larue Une Cerisaie bilingue et transfrontalière.

Entretien : Pascal Larue
Une Cerisaie bilingue et transfrontalière. - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 juin 2006 - N° 139

Pascal Larue, directeur du Théâtre de l’Enfumeraie d’Allonnes, et Sergueï
Afanasiev, directeur du City Drama Théâtre de Novossibirsk, proposent une
Cerisaie
bilingue qui scelle leur amitié et la complémentarité de leurs
talents.


Comment avez-vous rencontré Sergueï Afanasiev ?

Pascal Larue : Je l’ai rencontré en 1995, à Novossibirsk, où j’animais un
stage avec les acteurs de la ville. J’avais déjà travaillé avec Nika Kossenkova,
grande figure du théâtre russe et directrice du Théâtre Tembr de Moscou, en
mettant en scène avec elle une version bilingue des Trois S’urs. Sergueï
est un metteur en scène connu et reconnu, qui dirige une troupe de vingt-sept
acteurs permanents et forme des comédiens pour toute la Russie. J’ai toujours
beaucoup aimé son travail. De fil en aiguille, nous sommes devenus amis, il est
venu encadrer un stage AFDAS en France, j’ai monté un Molière avec les comédiens
de sa troupe, et depuis 95, nous n?avons pas arrêté de faire des échanges.

Comment est né votre désir de travailler ensemble ?

P.L. : Nous avons appris à avoir confiance l’un en l’autre. Je suis issu
de l’école Jacques Lecoq, Sergueï est marqué par l’héritage de Stanislavski :
nos différences rendent nos échanges très intéressants. Je crois que les
approches diverses et variées sont la force de la vraie création. Quand on
travaille ensemble, on décide clairement des champs de pouvoir de chacun : pour
La Cerisaie, c’est lui qui met en scène, moi, je joue ; il n?y a pas de
mise en scène bicéphale. Ce qui scelle aussi notre collaboration, c’est que loin
d’être seulement des esthètes, nous croyons que le théâtre et les acteurs ont
une mission humaniste.

« La cerisaie désigne cette part d’inutile en nous que nous devons
cultiver. »

Vous avez choisi de jouer la pièce en russe et en français.

P.L. : Paradoxalement, la compréhension est parfois plus facile en langue
étrangère que dans le mélange : quand on ne comprend pas du tout une langue,
soit on résiste, soit on oublie qu’on ne comprend pas et on passe alors à une
autre dimension de compréhension qui est celle de la langue du théâtre. Pour
La Cerisaie
, l’obstacle de la langue n?est pas apparu : il y a là une vraie
alchimie.

Vous voyez dans cette pièce l’illustration du conflit entre l’utile et
l’inutile.

P.L. : Les membres de cette famille sont des aristocrates oisifs, dont le
pouvoir cède face à l’émergence des valeurs du travail et de la rentabilité. La
cerisaie, c’est l’inutile. Mais aujourd’hui, c’est le monde de Lopakhine, celui
qui réclame que la moindre parcelle de terre soit productive, qui a gagné, et il
faut désormais se battre pour préserver l’inutile. Que restera-t-il de l’homme
quand il n?y aura plus de cerisaies à couper ? Pour Sergueï, la cerisaie est le
symbole de ce qui ne sert à rien mais nous est nécessaire pour vivre, ce qui est
à conserver précieusement, la part de notre enfance, de nos rêves, de notre
idéal.

Propos recueillis par Catherine Robert

La Cerisaie, d’Anton Tchekhov ; mise en scène de Sergueï Afanasiev. Du 17
au 27 juillet à 10h40, au Grenier à Sel.

A propos de l'événement



Les Pays de Loire en Avignon

Deux lieux pour les spectacles :

Le Grenier à sel

2, rue du Rempart Saint-Lazare, 84000 Avignon

Le chapiteau de l?Ile Piot

Réservations au 04 90 27 09 11

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