François Cervantes
Masques et Les Clowns : Gestes poétiques, [...]
Traductrice et auteur de théâtre, Dorothée Zumstein
traduit Shakespeare pour la première fois. Passionnant et éprouvant !
« La langue de Shakespeare ne prend pas de gants et met en scène des revirements insensés et effrayants, avec une brusquerie déconcertante. On ne peut jamais se reposer lorsqu’on on la traduit ! C’est une expérience assez folle parce qu’on est proche du trac du comédien. J’ai essayé de restituer le mouvement et le présent de cette langue incroyablement vivante, orchestrant des interactions infinies. J’ai pris la liberté de piocher dans les deux versions du Roi Lear : celle du folio, habituellement la version de référence, mais non exempte d’erreurs, et celle du quarto ; c’est une spécificité de cette traduction. En anglais de nombreux mots ont toute une gamme de sens, une variation minime peut éclairer la phrase différemment, provoquant par moments des sortes de révélations. La pièce est bouleversante, éprouvante, on en sort presque comme d’une épreuve physique. La mort de Cordélia, injustifiable et tragique, survient comme un dommage collatéral alors que les deux intrigues enchevêtrées sont dénouées. Au XIXe siècle, Cordélia ne mourait pas ! Ce travail de traduction, dans cette pièce où s’expérimente un long cheminement, change presque la manière de voir le monde… »
Propos recueillis par Agnès Santi