L’Arche de Noé de Britten, direction musicale d’Olivier Opdebeeck, mise en scène de Benoit Benichou
Benoit Benichou met en scène cet opéra de [...]
Focus -292-Au Théâtre de Caen, l'art de surprendre
Sébastien Daucé ressuscite un fascinant masque anglais du XVIIe siècle, une matière idéale pour les metteurs en scène inventifs Jos Houben et Emily Wilson.
Imaginez un monde renversé où les flèches de Cupidon auraient été échangées par erreur avec celles de la Mort, où les jeunes amants périraient tandis que les vieillards tomberaient amoureux ! Telle est l’histoire, inspirée par une fable d’Esope, de Cupid and Death, un drame anglais de 1653, signé James Shirley pour le livret et Christopher Gibbons et Matthew Locke pour la musique. Ce « masque », somptueux divertissement de cour en vogue à partir du règne d’Elisabeth Ire, ne pouvait qu’attirer Sébastien Daucé, à l’affût des formes de cohabitation entre théâtre et musique en marge de l’opéra, déjà né en Italie. Comme il l’explique, ce masque est fascinant pour plusieurs raisons : il est le seul que le temps ait conservé dans son intégralité ; musicalement, le manuscrit autographe de Locke montre « une certaine influence italienne dans l’envie de dire, et des formules très proches du ballet de cour français car beaucoup de musiciens français vivaient à la Cour de Londres, mais surtout on sent que cette musique, qui a nourri Purcell ou Blow, est à la fois en construction et très aboutie ».
Une grande entreprise de séduction pour l’Angleterre
Politiquement, l’œuvre se montre tout aussi intéressante : « elle est probablement due à une grande entreprise de séduction pour coïncider avec la signature d’un traité très important entre l’Angleterre et le Portugal, pendant la république de Cromwell. » Quant au monde renversé, idée centrale de Cupid and Death, il témoigne d’une profondeur étonnante. Pour Sébastien Daucé, l’humour de la pièce tout comme l’étrangeté de la musique s’expliquent autant par l’insularité britannique que par le contexte politique : « Là où Molière contourne ses critiques acerbes par des procédés rhétoriques, les critiques sont ici très directes ! » Il fallait pour mettre en scène ce masque des habitués du théâtre anglais et de Shakespeare : pari gagné avec Jos Houben et Emily Watson dont l’humour n’a d’égal que l’inventivité.
Isabelle Stibbe
Tél : 02 31 30 48 00
Site : theatre.caen.fr
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