Cédric Gourmelon part à la rencontre des publics

Dans le contexte politique difficile qui est le nôtre, comment le théâtre peut-il contribuer à apaiser les colères qui s’expriment dans les urnes ?

C.G. : Cette question se pose de façon aiguë à Béthune. L’extrême-droite est en effet fortement implantée dans le Pas-de-Calais. Je crois que nous devons encore accentuer notre travail sur l’itinérance afin d’aller toujours davantage au plus près des gens pour nous adresser à eux. Nos créations et nos actions doivent être pensées spécifiquement pour nos territoires, dans un souci de grande exigence artistique. Au-delà des spectacles, nous organisons aussi des ateliers, des stages, des résidences in situ… Quand les artistes se déplacent dans les communes de notre agglomération, les rencontres se font et elles sont fructueuses. Bien sûr, nous ne politisons pas notre programmation. Mais nous travaillons sur les valeurs d’inclusion et de parité. Il me paraît, par exemple, très important que des artistes issus de la diversité soient présents sur nos plateaux.

« Quand les artistes se déplacent dans les communes de notre agglomération, les rencontres se font et elles sont fructueuses. »

La transmission est l’un des axes centraux de cette nouvelle saison…

C.G. : En effet, c’est pour moi un axe essentiel. Le projet de l’incubateur prend ainsi de plus en plus de place à la Comédie de Béthune. L’idée de ce dispositif est d’accompagner de jeunes équipes, sur une période de deux ans, pour les soutenir dans la structuration d’un spectacle, des prémices de leur projet jusqu’à sa création. Pour cela, nous mettons à leur disposition tous les services du théâtre : la production, la communication, la technique… L’incubateur les aide dans l’autonomisation de leur compagnie. On leur apporte une grosse part de coproduction et elles créent leur spectacle à Béthune. En échange, ces compagnies s’implantent dans le Pas-de-Calais.

Pour quelle raison ne créez-vous pas de spectacle en 2024/2025 ?

C.G. : C’est un autre aspect de l’esprit de transmission qui souffle sur cette programmation. Dans un souci de partage de l’outil de création, j’ai décidé de laisser la place à d’autres équipes, de favoriser les coproductions d’autres artistes. Mon prochain spectacle, qui sera présenté en 2025/2026, sera une grosse production. Je mettrai en scène Edouard III de Shakespeare, une pièce qui n’a encore jamais été jouée en France. En attendant, cette saison 2024/2025 verra passer à Béthune de grands noms du théâtre français, comme David Bobée et Eric Lacascade qui signeront ensemble la mise en scène de Tragédie, le spectacle de fin d’études de la dernière promotion de l’École du Nord. Jean-François Sivadier présentera quant à lui le spectacle de sortie de la promotion 23 du Conservatoire national supérieur d’art dramatique, une création pour 14 interprètes intitulée Portrait de famille – Une histoire des Atrides. De jeunes artistes comme Emma Prin avec Hématome(s), Lisa Guez avec Psychodrame, Suzanne de Baecque avec Tenir debout ou Colin Rey avec La Vrille seront également présents sur nos plateaux.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat