Bruno Benne met en œuvre une vision contemporaine de l’héritage baroque

Comment vous êtes-vous spécialisé dans la danse baroque ?

Bruno Benne : J’ai commencé tout petit la danse folklorique avec mes parents. J’ai ensuite pris des cours de danse classique au Conservatoire de Toulouse, puis de contemporain au CNSMDP. Si je n’ai jamais ou très peu entendu parler de danse baroque pendant ma formation, j’ai entamé ma carrière par des productions lyriques à l’Opéra de Paris ou de Lyon et c’est là qu’est né mon goût pour cet univers. Je suis donc allé rencontrer des chorégraphes comme Béatrice Massin ou Marie-Geneviève Massé qui travaillaient sur cette esthétique. Elles m’ont invité dans leurs compagnies et j’ai parcouru leurs répertoires en tant que danseur, pendant 15 ans pour l’une et 20 ans pour l’autre. Parallèlement, j’ai fait la connaissance d’autres chorégraphes aux États-Unis et au Canada qui eux aussi questionnaient cette danse. Tout cela m’a amené en 2013 à fonder la compagnie Beaux-Champs, dans le but de mettre toutes les connaissances que j’avais acquises au service d’un travail de création et de poursuivre ainsi l’histoire entamée avec la reconstitution de la danse baroque dans les années 1970, de transmettre à mon tour cet héritage aux nouvelles générations.

« Nous allons repenser, renouveler la forme du concert dansé. »

À quel moment avez-vous été accompagné par la Caisse des Dépôts et que cela vous a-t-il apporté ?

B.B. : L’accompagnement a commencé en 2022 avec la pièce Rapides. Nous avons reçu un apport en coproduction conséquent, de l’ordre de 20 à 30 % du budget de création, ce qui nous a beaucoup aidés. Ce qui est aussi très important c’est que cela m’a permis de former une nouvelle génération de danseurs qui travaillera avec moi sur les prochains projets, la médiation, la création en danse baroque. Rapides est une pièce pour dix interprètes et j’ai renouvelé à cette occasion tous les artistes chorégraphiques de la compagnie. Si cette aide est prévue pour les chorégraphes, les jeunes danseurs en bénéficient également. Soutenir ces jeunes danseurs, ouvrir un dialogue avec eux, faire en sorte qu’ils puissent devenir intermittents m’importe beaucoup. Au-delà de l’aspect financier, j’ai pu bénéficier d’une résidence au CND au début de l’année dernière, ce qui m’a permis de mener des recherches pour les prochains projets de la compagnie. Et la Caisse des Dépôts s’est engagée sur notre prochaine création, Prendre l’Air.

Quelle est cette nouvelle création ?

B.B. : C’est un quintet dansé accompagné par un duo de clavecinistes. Nous allons repenser, renouveler la forme du concert dansé. Nous allons chercher à voir comment les modalités d’écriture et de composition de la danse et de la musique peuvent leur permettre de dialoguer, d’entrer en symbiose. Je pense qu’il y aura un décor très simple. Même si je l’ai beaucoup enlevé, le baroque est très lié au costume et là je vais renouer avec le volume, le tissu. Les danseurs porteront des traines, ce qui produira une silhouette baroque très affirmée, mais ces traines seront contemporaines, très légères. Elles vont prendre l’air lorsqu’ils se déplaceront et les danseurs comme les musiciens s’approprieront l’air de la musique, d’où le titre Prendre l’Air, qu’on peut lire dans les deux sens du terme. Il s’agira pour les interprètes de se déployer dans l’espace autant qu’au sein de la structure musicale.

Propos recueillis par Delphine Baffour