La Terrasse

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Bernard Foccroulle

Bernard Foccroulle - Critique sortie Jazz / Musiques

Publié le 10 octobre 2007

Aux origines de l’opéra

Définir Bernard Foccroulle relève de la gageure. Ce quinquagénaire belge, tout à la fois organiste, compositeur, musicologue, est aussi, depuis janvier, directeur du Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence. Le monde de l’opéra n’a pas de secret pour celui qui fut le patron de la prestigieuse Monnaie de Bruxelles de 1992 à 2007. Pour La Terrasse, il revient sur la production des Madrigaux de Monteverdi, créée cet été à Aix et reprise en octobre à Sceaux.

Pour votre premier partenariat avec le Théâtre de Sceaux, vous présentez des madrigaux de Monteverdi. Pourquoi un tel choix et non celui d’un ouvrage lyrique à part entière?

Bernard Foccroulle : Il y a deux définitions possibles de l’opéra. On peut soit le considérer de manière restrictive, soit opter pour une définition plus large, que je préfère, qui comprend aussi bien des grands oratorios de Haendel que La Damnation de Faust de Berlioz. Pour ce qui est des madrigaux de Monteverdi, il s’avère vraiment passionnant de confronter leur poésie à l’univers de la scène. Par ailleurs, je crois au travail sur les petites formes lyriques, qui apportent davantage d’énergie que les grandes machines. Le spectateur reçoit chaque élément musical, chaque geste théâtral.

Quel est le principe de l’Académie européenne d’Aix, dont les membres interpréteront le spectacle ?

B.F. : Fondée en 1998 par mon prédécesseur Stéphane Lissner, cette Académie se compose surtout de chanteurs, mais aussi d’instrumentistes. La priorité est donnée à l’interprétation mozartienne, car il n’y a rien de plus formateur. Les deux autres pôles sont la création contemporaine et la musique baroque. L’un des plus grands succès de l’Académie reste d’ailleurs la production du Retour d’Ulysse de Monteverdi avec William Christie. Le grand mérite de la « révolution baroque » a été de redécouvrir les partitions, non pas à partir de la postérité, mais à partir de ce qui précède. C’est le meilleur moyen de percevoir l’instant créateur. Et ces madrigaux de Monteverdi sont le jaillissement de l’opéra.

« Une mise en scène contemporaine permet de mieux percevoir ce qui nous rapproche et ce qui nous distancie de l’époque de l’œuvre. »

Pour quelles raisons avez-vous choisi de confier la mise en scène au chorégraphe Arco Renz ?

B.F. : Il est important de reprendre les œuvres dans leur commencement, mais cela ne veut pas dire qu’il faille imiter le contexte esthétique dans lequel elles sont nées. Une mise en scène contemporaine permet de mieux percevoir ce qui nous rapproche et ce qui nous distancie de l’époque de l’œuvre. Ce double mouvement est source d’émotion. Après avoir travaillé avec Anne Teresa de Keersmaeker et Luc Bondy, Arco Renz a su développer un vocabulaire gestuel qui lui est propre. J’aime sa confrontation avec la musique ancienne, basée sur un immense respect de l’œuvre.

Pourquoi avez-vous décidé de diffuser le spectacle sur une scène de théâtre, comme celle des Gémeaux ?

B.F. : Lorsque je travaillais à la Monnaie à Bruxelles, j’ai noué un grand nombre de partenariats avec ce type d’établissements. Cette démarche permet d’aller à la rencontre d’un nouveau public. Je regrette que l’opéra fonctionne parfois trop en vase clos. Par ailleurs, j’ai demandé aux équipes du spectacle de s’imprégner de la configuration du théâtre avant de concevoir la scénographie. La souplesse de celle-ci permet de faire ressortir le génie de chaque lieu.

Comment conciliez-vous vos activités de directeur d’opéra et celle d’instrumentiste ?

B.F. : J’aime le contraste. D’un côté, il y a le monde extraverti de l’opéra et, de l’autre côté, la solitude de l’organiste. Par ailleurs, j’évite tout conflit d’intérêt puisque l’orgue n’est presque jamais présent à l’opéra ! Mon activité de directeur étant de plus en plus forte, j’ai malheureusement dû sacrifier la pédagogie et la musique de chambre pour me limiter au répertoire soliste. De plus, je me consacre à la composition…

Propos recueillis par Antoine Pecqueur


Les Madrigaux de Monteverdi ; mise en scène : Arco Renz ; direction musicale : Kenneth Weiss. Du 3 au 7 octobre 2007.

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