La Terrasse

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ALVIS HERMANIS

ALVIS HERMANIS - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 juin 2010

LE DRAME DU TEMPS INEXORABLEMENT PERDU

FIGURE MAJEURE DU THEATRE CONTEMPORAIN LETTON, ALVIS HERMANIS EXPLORE LE TEMPS PERDU SANS TABOU NI NAPHTALINE, MAIS AVEC UN ART A PLEINE MATURITE.

« La scène est l’espace de l’éphémère, où s’éprouve constamment le sentiment du temps enfui. » Alvis Hermanis
 
 
Un thème traverse vos créations et relie Les demoiselles de Wilko et The Sound of Silence : la mémoire.
Alvis Hermanis : Toutes mes pièces travaillent en effet sur les mémoires collectives et intimes. Seules les vieilles personnes ont des histoires… Le passé porte une charge émotionnelle et une aura affective qui me fascinent. Moi-même, j’ai la nostalgie du siècle dernier. Ma mentalité et mon imaginaire appartiennent à ce temps-là. Je me sens simple visiteur au xxie siècle. La scène est l’espace de l’éphémère, où s’éprouve constamment le sentiment du temps enfui. C’est ce qui en fait un art profondément mélancolique. Mon approche du théâtre est somme toute traditionnelle : fondée sur l’émotion, le jeu des acteurs, les êtres humains…
 
Comment ces deux créations mettent-elles en jeu le rapport au passé ?
A. H. : Les demoiselles de Wilko, pièce tirée d’une nouvelle de l’écrivain polonais Jaroslaw Iwaszkiewicz, suit un homme, qui, après 15 ans d’absence, revient dans la ferme où il passait ses vacances en compagnies des six filles du propriétaire. Il tente de retrouver ses souvenirs mais ne parvient pas à renouer avec le passé ou même simplement à le continuer. L’écriture d’Iwaszkiewicz évoque avec force et sensualité les sensations, les odeurs, les images de ce temps inexorablement perdu. The Sound of Silence est écrit à partir d’improvisations sur les célèbres chansons de Simon et Garfunkel. Cette pièce sans parole ne vise pas à la reconstitution historique des années 60, mais explore plutôt l’imaginaire qu’elles suscitent aujourd’hui. Elle s’appuie sur le langage des corps et des situations, à la manière des films de Jacques Tati. A cette époque, dans les républiques soviétiques comme la Lettonie, les hippies et les artistes dépolitisés étaient considérés par le KGB comme plus dangereux que les dissidents politiques.
 
Vous changez radicalement d’esthétique d’une création à l’autre. Une nécessité ?
A. H. : Oui, pour rester dans l’incertitude, essayer ce que je n’ai encore jamais tenté, ne pas me parodier moi-même. C’est l’exigence de l’art pour qu’il ne soit pas utilisé comme une simple marque commerciale.

Entretien réalisé par Gwénola David


Les Demoiselles de Wilko et The Sound of Silence, conception et mise en scène d’Alvis Hermanis, du 27 avril au 6 mai 2011.

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