Reprise de « Mère » de Wajdi Mouawad
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Drôle, brillant, féerique : le périple sous les mers que façonnent Christian Hecq et Valérie Lesort à partir du roman de Jules Verne est une pépite. À ne pas manquer, de 7 à 107 ans.
« Larguez les amarres ! En avant toute ! » C’est parti pour une odyssée maritime merveilleusement ciselée, aussi scintillante que la mer au clair de lune. Pour un somptueux théâtre d’images à bord du Nautilus, une aventure joyeuse, burlesque quoique en soi plutôt tragique et teintée de mélancolie. Dans le sous-marin né de l’imagination de Jules Verne, trois naufragés sont retenus prisonniers : le professeur Pierre Aronnax, professeur au Muséum d’histoire naturelle de Paris (Eric Prat, d’une bonhommie toute scientifique), son fidèle serviteur Conseil (Laurent Natrella, délicieusement burlesque et vintage), Ned Land, maître harponneur (Rodolphe Poulain, impeccable dans sa simplicité un peu rude). Tous trois s’étaient embarqués à bord de l’Abraham Lincoln afin de traquer le monstre qui terrorise les océans, monstre qui n’est pas vraiment un narval… Le Capitaine Nemo, maître des lieux (Eric Verdin, belle prestance et tristesse amère) souhaite garder secrets son existence et son voyage, préférant la libre nature de la mer aux maux de la civilisation. « Je ne suis pas un homme civilisé » affirme ce misanthrope savant, à la pointe du progrès. Il est assisté par son étonnant second Flippos (Pauline Tricot, remarquable clown), avec qui il converse dans une langue inventée. Un sauvage pas si effrayant que ça (Mikaël Fau, athlétique et truculent) s’invite même sur le divan du sous-marin…
Une magie qui enchante le regard
Les comédiens ici se font « manipulacteurs » : leur formidable jeu incarné sur le plateau se conjugue à une maîtrise des marionnettes réglée au cordeau, au cœur du noir, ce qui rend la manipulation invisible à nos yeux. Derrière le vaste hublot du Nautilus apparaît le monde subjuguant des profondeurs : de gracieuses méduses, un Zanclus Cornutus marrant, de facétieux poissons suçons, un poisson des abysses aux dents effilées, un poulpe géant menaçant… Ces drôles de créatures n’hésitent pas à regarder avec curiosité l’agitation des humains, et aiment aussi être regardées par des humains spectateurs de leurs mouvements. Dans cette pièce d’un très haut niveau technique et artistique, initialement créée au Théâtre du Vieux-Colombier en 2015 dans une autre distribution et unanimement saluée, le théâtre du marionnettiste et sociétaire de la Comédie-Française Christian Hecq et de la plasticienne et metteuse en scène Valérie Lesort joue à plein de sa magie colorée et enchante le regard. L’artisanat millimétré de la fabrication se mêle au piquant des situations et du jeu, burlesque jusqu’à de réjouissants clins d’œil. Pas de vidéo, pas de sophistification, mais une simplicité très complexe à réaliser, qui est la marque des talents véritables. La scénographie et les costumes d’Eric Ruf, les lumières de Pascal Laajili, la bande sonore de Dominique Bataille, les marionnettes de Valérie Lesort et Carole Allemand, la voix off de Cécile Brune contribuent à la réussite de l’expédition. Un voyage pour retrouver l’émerveillement de l’enfance, à tout âge.
Agnès Santi
Du mardi au vendredi à 20h ; samedi à 20h30 ; dimanche à 16h.
Tél. : 01 42 08 00 32.
Durée : 1h30.
À partir de 8 ans.
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