
Gérard Watkins présente « Voix » au Théâtre de la Tempête
A l’automne dernier, il recevait le Grand […]
Cette souffrance que la psychiatrie nomme communément schizophrénie sert de sujet à la nouvelle création de Gérard Watkins, homme de théâtre complet, lauréat à deux reprises du Grand Prix de Littérature Dramatique. Le spectacle, immersif, milite poétiquement et politiquement pour une troublante conversion du regard.
Cet intérêt pour ceux que Gérard Watkins nomme « les entendeurs de voix » – en France, ils seraient plusieurs centaines de milliers – s’inscrit, notamment, dans le sillage du travail qu’il a conduit sur deux de ses précédentes créations : Hamlet avec Anne Alvaro et Ysteria évoquant l’hystérie. Son bel appétit dramatique pour les sujets qui ont tendance à passer sous les radars n’est donc pas encore démenti. Et de ce troublant phénomène psychique qu’il regarde « comme un mystère porteur de sens », il avoue « être tombé littéralement amoureux ». Il y a en effet une forme de grande tendresse dans la manière dont l’auteur et metteur en scène raconte et s’empare de l’histoire de ses cinq personnages fictifs qu’il réunit dans un groupe de parole. Gérard Watkins les dépeint et les fait vivre décidés à courageusement faire entendre leur voix dans la pluralité singulière qui la caractérise ; pluralité qu’il s’agit davantage d’apprendre à apprivoiser qu’à éradiquer. « J’ai voulu dessiner des portraits humains, imaginer les ressentis de ces êtres singuliers afin de favoriser le voyage des spectatrices et des spectateurs au sein de leur existence » déclare-t-il.
De vraies performances d’acteurs
L’ambition de permettre à chacun d’appréhender le vécu des « entendeurs de voix », habités « pour de vrai » par d’autres personnalités avec lesquelles ils sont les seuls à pouvoir communiquer, est atteinte grâce à l’empathie que les acteurs savent susciter sans jamais tomber dans le pathos. Au passage, les préjugés et a priori normatifs qui leur sont vulgairement attachés sont défaits. La possibilité d’un rétablissement comme celle d’un endiguement volontaire de ces présences perturbatrices – pour le meilleur et pour le pire – sont sans cesse mises en perspective. Tous tentent d’ouvrir d’autres voies par d’autres biais : l’humour, l’autodérision ou la colère éprouvés par ce moi malmené qui est le leur. Lié aux exigences de ce « je est plusieurs », le jeu de Valérie Dréville, Marie Razafindrakoto, Malo Martin, Lucie Epicuréo se ploie avec aisance aux changements de personnalité quasi instantanément requis. Au déploiement des incarnations, le décor n’offre pas beaucoup de prise. Dans les premier et deuxième tableaux, une salle aux murs décrépis accueille un groupe de parole dont personne ou presque ne se soucie. Le troisième et dernier moment réserve quelques surprises encadrées par un nouveau dispositif scénographique, plus riche mais non moins exigeant. Il faut dire un mot de la partition musicale signée et jouée par Camille Prenant pour souligner son élégance et sa pertinence.
Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens
Gérard Watkins présente « Voix » au Théâtre de la Tempête
A l’automne dernier, il recevait le Grand […]
Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h. Tél : 01 43 28 36 36. Durée : 1h45. À partir de 15 ans.
Spectacle vu et créé le 26 avril 2023 au Théâtre des Îlets – CDN de Montluçon
Et aussi du 5 au 8 décembre 2023 à La Comédie de Saint-Etienne, Centre Dramatique National.
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