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Danse - Entretien / Christophe Martin

Avec Christophe Martin, directeur de Micadanses et de Faits d’Hiver, un festival tout en mouvement !

Avec Christophe Martin, directeur de Micadanses et de Faits d’Hiver, un festival tout en mouvement ! - Critique sortie Danse Paris Micadanses
Crédit : Laurent Paillier Christophe Martin, directeur de Micadanses et de Faits d’hiver, futur retraité

Entretien Christophe Martin

Publié le 18 décembre 2025 - N° 339

Christophe Martin, directeur de Micadanses et de son festival Faits d’Hiver, revient sur cette 28e édition… et sur son avenir.

Cette 28e édition de Faits d’Hiver explore la question de la relation – à travers des générations, des filiations, des esthétiques… Pourquoi et comment cela se formalise-t-il ?

Christophe Martin : Je constate, depuis 28 ans que je programme ce festival, qu’il y a finalement très peu de chorégraphes qui ont arrêté de chorégraphier. On se retrouve donc dans un paysage parcouru par de nombreuses générations, très intriqué, mais qui n’est pas considéré dans son ensemble car beaucoup de programmateurs ont tendance à se focaliser sur une esthétique ou une génération. On associe souvent la nouveauté aux jeunes chorégraphes. Cette approche a ses vertus, mais elle ne nous permet pas d’envisager toute la richesse disponible. Cela pose la question de savoir sur qui on pose le regard, de ce qu’on décide de mettre en avant. Ma réponse, c’est qu’avoir autant de personnes d’âges différents donne l’avantage de disposer d’un véritable éventail d’esthétiques, de maturations, de façons de comprendre la danse. Par exemple, une soirée me tient particulièrement à cœur : celle qui réunit Jean-Christophe Boclé et Anne-Sophie Lancelin. Lui, qui a plus de soixante ans, a développé une façon d’écrire la danse très personnelle, avec des problématiques liées directement à la composition, avec des interprètes qui sont dans un véritable lien d’accompagnement. À l’inverse, Anne-Sophie Lancelin s’intéresse beaucoup à l’écriture de la danse, mais intègre dans sa nouvelle création la présence de Christine Gérard. Entre elles, il y a bien deux générations d’écart. Certains pourraient trouver cette soirée un peu désuète, mais non : ce sont des gens qui créent. Simplement, ils ne mettent pas forcément en avant les thématiques d’aujourd’hui. Ils mettent en avant la danse qui se construit, et le rapport à la musique.

Pourquoi avoir choisi de programmer à nouveau le solo L’envahissement de l’être de Thomas Lebrun ?

C.M. : Je trouve qu’on est extrêmement timides sur le statut de ce qu’est un chef-d’œuvre, ou en tout cas une œuvre qui compte. On est toujours happés par l’actualité, et on ne se donne pas le temps, ni le droit, de remontrer des œuvres. Cette œuvre expose Thomas Lebrun d’une façon unique dans sa carrière. Son alter ego, c’est Duras. Personne ne pouvait penser que Thomas Lebrun, capable de toutes les fanfreluches et de franches rigolades, est habité par un monde à la Duras, et que c’est une chose qui le traverse d’une manière poignante, une chose qui nous emmène vers un trouble immense.

« Tout cela devrait permettre de faire émerger un dynamisme, des associations, des ponts de toutes sortes particulièrement intéressants. »

C’est une édition qui a été conçue comme la dernière de votre part, sachant qu’à l’issue, vous prenez votre retraite. Est-ce une édition comme les autres, ou une ultime édition ?

C.M. : Il est clair que ce n’est pas du tout testamentaire. Quand j’ai commencé à y travailler, je l’ai vécu comme une chance, celle de faire ce que j’ai aimé faire jusqu’à présent : réunir, associer, faire se rencontrer, découvrir, sans avoir besoin de surligner le fait que c’était ma dernière édition. Mais il y a des petits clins d’œil : on retourne à L’Étoile du Nord, et aussi au théâtre Silvia Monfort, déterminants dans l’histoire du festival. Il y a aussi le fait que la SACD nous soutient à nouveau, elle qui a été le premier financeur du festival. L’histoire fait que je vais quand même programmer l’édition suivante, en collaboration avec Anne Sauvage, directrice de l’Atelier de Paris !

Pourquoi les cartes ont-elles été rebattues ? Que se passe-t-il ?

C.M. : L’Association pour le Développement de la Danse à Paris, qui comprend Faits d’Hiver et Micadanses, va être associée à l’Atelier de Paris dans une seule structure juridique, en tant que Centre de Développement Chorégraphique National. Dans ce cadre-là, l’activité de Micadanses sera préservée, et il a été acté qu’il pourra y avoir un festival en hiver. Ce rapprochement n’est pas fait pour réaliser des économies : le budget des deux structures est maintenu, sachant que le premier coproducteur du festival est Micadanses. Une lettre de mission de la DRAC va permettre de créer un projet artistique plus précis, qui sera finalisé en 2027. La préservation de June Events et de Pulse est également évoquée. Tout cela devrait permettre de faire émerger un dynamisme, des associations, des ponts de toutes sortes particulièrement intéressants. Ce qu’il faut imaginer, c’est la création d’une structure d’envergure nationale, avec huit studios sur deux sites, et le maintien de l’emploi.

 

Entretien réalisé par Nathalie Yokel

A propos de l'événement

festival Faits d’Hiver
du lundi 19 janvier 2026 au vendredi 20 février 2026
Micadanses
15 rue Geoffroy-L’Asnier, 74004 Paris

Tél. : 01 71 60 67 93.

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