Jeanne d’Arc au bûcher et Caligula
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Décidée à « créer des objets vivants, ensembles émotionnels où le spectateur est convié à un cheminement personnel », la metteure en scène Anne Theron relève un nouveau défi avec Contractions. Le huis clos retrace sans pathos, au sein d’une grande entreprise, l’assujettissement d’un être à l’ordre financier.
Comment avez-vous rencontré cet auteur ?
Anne Theron : Je cherchais une petite forme pour deux acteurs. Un texte contemporain. En parlant de ce désir au Théâtre du Rond-Point où j’avais dirigé une lecture publique, j’ai été invitée à lire la pièce de Mike Bartlett dont la renommée outre-Manche n’est plus à faire. Ce texte est apparu comme une évidence, à chaud. L’auteur ose l’impensable avec pas moins de quatorze scènes, seulement deux comédiennes et des dialogues où la répétition est portée à son paroxysme. On est à l’os. Pas un mot de trop entre ces deux femmes, la manager de l’entreprise et Emma son employée, dont la vie va progressivement basculer dans l’horreur et le cauchemar. L’auteur nous propulse dans un univers fantastique où la logique émotionnelle repose sur un pur sentiment de stupéfaction.
« Tout est construit sur la tension du face-à-face des deux protagonistes. »
« La mise en scène comme acte d’écriture » est le parti pris de votre compagnie Les Productions Merlin. Comment se traduit-il avec cette nouvelle création ?
A.T : La question n’est pas de mettre en scène. Je reprends volontiers à mon compte la phrase de Thomas Bernhard : « contentez-vous de dire le texte et dites-le bien ». Ce principe est au cœur de la création de cet objet qui n’existe qu’en trois dimensions. Ici tout est construit sur la tension du face-à-face des deux protagonistes, qui font entendre et résonner cet échange glacial dans une esthétique irréelle, loin du style high-tech des entreprises contemporaines. Il y a de la couleur mais celle du tungstène, celle de ces arrières salles dans de vieilles fabriques, lieux idéaux pour un passage à tabac sans bruit et sans traces. Tout est très minimaliste. Nous sommes ailleurs, dans un hors temps, un non espace, et l’architecture de la pièce s’inspire de l’écriture cinématographique des séries télévisuelles, parce que la pièce même induit cette forme scénique dans sa dramaturgie.
Pour ce face-à-face qui porte haut les difficultés propres au huis clos, comment avez-vous choisi les actrices ?
A.T : Le casting a été long. Evidemment, pour tenir ces rôles, il fallait des comédiennes très confirmées. J’avais déjà rencontré Julie Mounier – qui joue la manager – lors d’une lecture à la Maison de la poésie. Mais à l’origine, quand je l’ai sollicitée, elle était engagée avec Patrice Chéreau sur un autre projet. Par ailleurs, j’avais des soucis pour trouver celle qui allait incarner Emma jusqu’au jour où j’ai rencontré India Hair. Les circonstances de la vie nous ont permis de nous rassembler. Et coïncidence merveilleuse, les deux actrices réunies par ce projet avaient très envie de travailler ensemble depuis longtemps.
Propos recueillis par Marie-Emmanuelle Galfré
A 20h45. Rencontre sur le plateau le mardi 20 janvier 2015 à l’issue de la représentation. Tél : 01 64 62 77 00. www.lafermedubuisson.com
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