4 questions à Rockingchair
La trompettiste Airelle Besson et le saxophoniste Sylvain Rifflet sont les
prototypes de ces jeunes musiciens français et frondeurs, à la jeune trentaine
cinglante, aussi familiers des langages du jazz, du rock et de l’électro.
Musiciens adaptables, spectaculaires et virtuoses, très demandés en tant que « sidemen »
par leurs aînés (Riccardo Del Fra, François Jeanneau, Laurent Cugny, Didier
Levallet, Charlie Haden, Carla Bley, Andy Emler etc.), ils signent le premier
album de leur propre groupe, Rockingchair, sur le remuant label Chief Inspector.
Du jazz libre comme l’air. Rencontre entre deux complices parfaits.
Quand et comment le groupe est-il né ?
Airelle : Le groupe est né fin 2002 de l’envie de mettre en commun nos
idées et de créer un quintet dirigé par nous deux autour de notre musique. Cette
période correspond à la fin de nos études au CNSM de Paris où nous avons obtenu
l’un et l’autre un prix de jazz.
Sylvain : Pour l’enregistrement, les motivations furent essentiellement
de graver le répertoire que nous travaillions depuis les débuts du groupe. Avec
pour objectif premier de travailler le disque comme le font les groupes de pop
ou de rock, c’est-à-dire en travaillant au maximum sur le son de l’orchestre.
Nous avons pris le temps de choisir les instrumentations, les rythmiques, de
retravailler les formes, bref de faire un réel travail de studio et ce, dès la
phase d’enregistrement.
Dans le nom du groupe, il y a « Rock »…
Airelle : Notre musique est un mélange entre jazz, rock,
improvisation/écriture, électronique/acoustique. Ces contradictions nous
intéressent, nous voulons les expérimenter. Notre souci permanent étant le son
de l’orchestre, c’est lui qui guide la musique.
Sylvain : Rockingchair est un groupe de jazz, définitivement, et je ne
veux pas que cela devienne un groupe de pop. Je tiens à ce que nous gardions le
côté libre et mélodique de notre musique tout en y mettant autre chose en termes
de son. Nous reproduisons en concerts les mêmes effets que sur le disque en
utilisant les ordinateurs, chose que je n’ai pas encore vu faire ailleurs, en
jazz du moins.
« Notre souci permanent est le son de l’orchestre, c’est lui qui guide la
musique. »
Rock, électro, improvisation, tout cela est brassé dans votre musique, mais
dans un esprit général très jazz et acoustique?
Sylvain : Je crois que le jazz a toujours été le fruit de métissages.
Mais ses codes sont devenus aussi rigides que ceux de la musique classique.
J’écoute très peu de jazz aujourd’hui, principalement car j’en trouve le son
monotone. J’ai vraiment envie d’amener dans notre musique des sons nouveaux. Je
suis donc très influencé par ce qui se fait en musique électronique ou dans la
pop anglaise.
Pouvez-vous citer des projets ou artistes dans le domaine du jazz avec
lesquelles vous pourriez établir un lien avec la musique de Rockingchair ?
Airelle : Joey Baron pour le son et le jeu qui sont les siens. Dave
Douglas aussi, pour son écriture musicale optant pour des formes ouvertes et non
figées.
Vous avez l’un et l’autre beaucoup joué avec d’autres musiciens, souvent
prestigieux. Citez un artiste qui vous a marqué.
Airelle : Il m’est impossible de n?en citer qu’un? Sylvain Rifflet : seul
musicien avec qui je suis « unie ». Je me fonds dans son jeu. Il a un son, un
phrasé, une expressivité uniques. Nelson Veras : il m’a complètement ouvert les
oreilles. Un des rares musiciens avec lequel je m’entends musicalement, avec qui
je parle réellement et naturellement la même langue, très généreux. Et Magic
Malik : musicien extraordinaire, d’une exigence rare qui m’a fait découvrir un
nouveau mode de jeu, d’écriture musicale, une nouvelle notation musicale, un
nouvel univers.
Sylvain : Airelle Besson, pour son sens de la mélodie et sa sonorité
unique.
Propos recueillis par Jean-Luc Caradec
Nouvel album : « Rockingchair », à paraître le 24 mai (chez Chief Inspector).
Le 8 juin à 21h au Studio de l’Ermitage. Tél. 08 71 33 21 91. Site :
www.chief-inspector.com