La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Voyage en Italie d’après Montaigne, mis en scène par Michel Dydim

Voyage en Italie d’après Montaigne, mis en scène par Michel Dydim - Critique sortie Théâtre Nancy La Manufacture - CDN Nancy-Lorraine
Loïc Godec, Bruno Ricci, Luc-Antoine Diquéro et le cheval Réal. © Eric Didym

d’après Montaigne / mes Michel Dydim

Publié le 18 mars 2019 - N° 274

En portant à la scène le voyage en Italie effectué par Montaigne en 1580, Michel Didym privilégie la dimension humaine de l’écrivain.

« Rien de ce qui est humain ne m’est étranger », « Parce que c’était lui, parce que c’était moi »… Ces sentences dont le souvenir date souvent du lycée ont eu tendance à figer Montaigne dans l’archétype de l’humaniste de la Renaissance, l’érigeant au statut d’icône ou presque. Et même si, comme le remarque fort justement Michel Didym, chaque génération s’est approprié Montaigne et « a lu dans les Essais ce qu’elle voulait y voir », un petit tour par l’Italie permet de mieux connaître l’homme. Car en 1580, quittant l’Aquitaine ravagée par les guerres de religion, Montaigne entreprend un voyage jusqu’à Rome (où il baise la pantoufle du pape), en passant par Paris (où il remet au roi ses Essais), la Lorraine et l’Allemagne. Une aventure relatée dans son Journal de voyage en Italie, une espèce de carnet de bord non destiné à la publication et retrouvé au XVIIIe siècle seulement. En extrayant des passages de ce texte et des Essais, Michel Didym restitue les dix-sept mois d’itinérance à cheval de Montaigne, en compagnie de son secrétaire et d’un palefrenier.

La bienveillance de Montaigne pour autrui

Dans son montage et sa scénographie, le metteur en scène met l’accent sur le prosaïque : sur la scène recouverte de pelouse, un bivouac réunit les trois hommes, campant au pied d’un arbre et entourés d’un vrai cheval et d’une poule. Montaigne (Luc-Antoine Diquéro) est avant tout un corps souffrant, qui entre deux crises de gravelle, évoque avec son secrétaire (Bruno Ricci) les étapes qu’ils ont accomplies. Curieusement, alors que l’origine de ce spectacle était né des attentats contre Charlie Hebdo et de l’envie de faire un parallèle entre les guerres de religion et notre époque contemporaine (voir notre entretien https://www.journal-laterrasse.fr/le-voyage-en-italie-dapres-montaigne-mis-en-scene-par-michel-didym/), les textes choisis par Michel Didym tendent à évacuer cet aspect au profit de considérations liées aux mœurs étrangères que Montaigne rencontre. Si ce parti pris permet d’apprécier la curiosité et la bienveillance de Montaigne pour autrui, l’ethnographie tourne vite à l’anecdote et au guide touristique : ici on mange des œufs pochés au beurre, là on trouve de la moutarde « qui se sert liquide »… Ainsi, malgré quelques scènes enlevées de danse allemande ou de comédie à l’italienne, les comédiens Luc-Antoine Diqueiro et Bruno Ricci, pourtant excellents, peinent à sortir le spectacle de la monotonie. Il reste heureusement le plaisir d’entendre cette langue du XVIe siècle, une langue imagée et pleine de vitalité.

Isabelle Stibbe

 

A propos de l'événement

Voyage en Italie
du mardi 12 mars 2019 au vendredi 22 mars 2019
La Manufacture - CDN Nancy-Lorraine
10 rue Baron Louis, 54000 Nancy

Tél. : 03 83 37 42 42. Durée : 1h30.

Tournée : Bordeaux (33) Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine du 27 au 30 mars 2019, Châlons-en-Champagne (51) La Comète - Scène Nationale du 2 au 3 avril 2019, Angoulême (16) Théâtre d’Angoulême - Scène Nationale du 14 au 15 mai 2019, Palaiseau (91) Théâtre de la Passerelle le 6 juin 2019…

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