La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Une étoile pour Noël ou l’ignominie de la bonté

Une étoile pour Noël ou l’ignominie de la bonté - Critique sortie Théâtre
Mention photo : Sébastien Calvet Légende photo : Nasser Djemaï croque tous ces bons Samaritains de l’assimilation qui décolorent l’Autre à la Javel républicaine, quitte à le rendre transparent.

Publié le 10 décembre 2007

Reprise

Loin des poncifs condescendants ou des caricatures banlieusardes, Nasser Djemaï croque l’ignominie inconsciente des bons Samaritains de l’intégration.

« Faut pas ti rissembles à moi ». Ce mot d’ordre lâché dans un français écorché par un père ouvrier qui trime dans une mine de ciment, le petit Nabil l’a vissé dans la caboche toute son enfance. Il deviendra donc Premier ministre de la France, promesse solennelle en est faite – secrètement – au paternel ! Pataugeant dans le marécage de l’école républicaine, le fils d’immigré trouve chez son camarade Jean-Luc une famille d’adoption qui va le rincer de ses origines et le hisser sur les rails de la réussite sociale. Tante Geneviève, missionnaire fraîchement rapatriée d’Afrique en mal de bonnes œuvres à accomplir, entreprend avec mansuétude de civiliser cet enfant en friche et de le fondre dans le moule des valeurs de la bourgeoisie catholique, les seules qui vaillent, évidemment. Fini, les courses de chariot chez Carrefour et les soirées au Macumba… Le gamin enfile un à un tous les atours de la distinction afin de se glisser dans le costume amidonné du jeune-diplômé-plein-d’avenir, fasciné qu’il est par la reconnaissance que procurent ces estampilles dans la « bonne société ».
 
Le mordant de l’ironie et la finesse du jeu
 
Nabil ponce ainsi son accent, puis blondit ses cheveux, puis s’inscrit à l’aumônerie, puis troque son prénom pour celui de Noël… jusqu’à renier sa famille pour devenir un parfait clone du modèle français d’intégration, qui, rivé à l’idéal d’universel, ne sait pas penser l’altérité. Sauf que, in fine, le droit du sang prévaut sur celui du sol… En témoigne l’étonnante uniformité chromatique de nos classes dirigeantes. Seul en scène, Nasser Djemaï fait vivre tous les personnages de cette histoire, largement autobiographique, avec le talent du Caubère d’avant le cabotinage. Maniant le mordant de l’ironie et la finesse du jeu, il croque ces bons Samaritains de l’assimilation qui décolorent l’Autre à la Javel républicaine, quitte à le rendre transparent.
 
Gwénola David


 Une étoile pour Noël ou l’ignominie de la bonté
De et par Nasser Djemaï, Mise en scène Natacha Diet au Lucernaire Théâtre Rouge à 21h30 du mardi au samedi, 15h dimanche du 23 novembre au 20 janvier Représentation exceptionnelle lundi 31 décembre. Réservation

Tél 01 45 44 57 34 du lun au ven de 10h à 12h30 et de 13h30 à 18h et le sam de 13h30 à 18h 
www.lucernaire.fr, 53 rue notre-dame-des-champs 75006 Paris.M° Vavin ou notre-dame-des-champs. Prix de 10€ à 30€

A propos de l'événement


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