Un moment fort : la mise en scène de Léna Paugam de « Gisèle Halimi, une farouche liberté » d’après Annick Cojean, avec Philippine Pierre-Brossolette et Ariane Ascaride
Reprise / La Scala Paris
Publié le 29 février 2024 - N° 319En reprenant ce spectacle créé à La Scala Paris la saison dernière, Ariane Ascaride et Philippine Pierre-Brossolette perpétuent l’intensité des paroles et des combats de Gisèle Halimi. Dans une mise en scène minimaliste de Léna Paugam, les deux comédiennes disent, exhortent, s’engagent. Un moment fort.
C’est en août 2020, quelques semaines après la disparition de Gisèle Halimi (le 28 juillet de la même année, à l’âge de 93 ans), qu’a paru Une farouche liberté aux Éditions Grasset. Cosigné par la journaliste Annick Cojean, ce livre d’entretiens traverse l’existence de la célèbre avocate et militante féministe en faisant ressortir l’ardeur indéfectible, nécessaire, de ses luttes et de ses engagements. « Il me semble fondamental d’honorer nos résistants, nos résistantes », déclare la comédienne Philippine Pierre-Brossolette. C’est elle qui est à l’origine du projet d’adaptation au théâtre de cet ouvrage. Elles sont deux, devant ou parmi les publics, à s’emparer des mots de Gisèle Halimi pour leur redonner vie, pour les perpétuer. Philippine Pierre-Brossolette, donc, et Ariane Ascaride. La parole passe de l’une à l’autre. Sans souci de personnage. Gisèle Halimi, une farouche liberté suit la voie d’un théâtre-récit qui amène les deux interprètes à dire, à transmettre au lieu de composer ou d’imiter.
Un mémorandum théâtral pour le devoir de révolte
Il n’est en effet pas question, ici, d’incarner de façon naturaliste celle qui prit fait et cause pour tant de femmes et d’hommes bafoués dans leurs droits. Il s’agit plutôt de faire surgir la force toujours vivante, tellement contemporaine, des combats que mena Gisèle Halimi au long de son existence, des idées humanistes qu’elle a défendues jusqu’à sa mort. Droit des peuples colonisés à disposer d’eux-mêmes. Refus de la torture. Droit des femmes à se réapproprier leur corps en ayant la possibilité d’avorter librement. Lutte pour la criminalisation du viol. Engagement en faveur du principe de parité en politique. Les sujets se succèdent et une hauteur de vue s’impose. La façon dont les deux actrices servent la pensée de Gisèle Halimi nous transporte au-delà de l’efficacité théâtrale. Plutôt que de donner lieu à une performance, elles posent un acte. Un acte simple, franc, important, qui se nourrit de leurs deux présences complémentaires. Philippine Pierre-Brossolette a la vivacité de la jeunesse. Ariane Ascaride porte en elle toutes les indignations et les révoltes qu’on lui connaît. Entendre cette grande figure d’artiste-citoyenne prononcer les paroles de Gisèle Halimi nous mène loin. Comme son aînée avocate, la comédienne a la conscience pointilleuse de celles qui savent dire non. Elle apparaît, aujourd’hui, en passeuse de témoin.
Manuel Piolat Soleymat
A propos de l'événement
Gisèle Halimi, une farouche libertédu mardi 27 février 2024 au dimanche 31 mars 2024
La Scala Paris
13 boulevard de Strasbourg, 75010 Paris
à 15h, 17h, 19h ou 21h. Tél. : 01 40 03 44 30. Durée de la représentation : 1h20. www.lascala-paris.com