Théâtre en CieS
©© Cici Olson
Le Chagrin des Ogres de Fabrice Murgia, plongée dans un monde imaginaire et sensoriel.
© Cici Olson
Le Chagrin des Ogres de Fabrice Murgia, plongée dans un monde imaginaire et sensoriel.
Publié le 10 novembre 2010
Rendez-vous de la scène belge francophone, Théâtre en CieS permet de découvrir à Paris des artistes particulièrement inventifs, reconnus en Belgique, mais encore peu présents sur les scènes hexagonales.
Le Carré des Cosaques de François Houart, directement inspiré de l’enfance de l’auteur dans un home belge de réfugiés russes, désigne un coin de cimetière où s’alignent des croix orthodoxes et des noms imprononçables. Seul en scène, François Houart convoque les “chers fantômes“ de son enfance, réfugiés échoués en Belgique après moult péripéties, survivant grâce à la charité et la débrouille, et leur rend un hommage irrévérencieux, tendre et romanesque. Causerie sur le lemming de François-Michel van der Rest et Elisabeth Ancion se déploie comme une causerie délirante, un voyage incongru et délectable qui, de digressions en progressions, passe par Jørn Riel et ses histoires du Groenland, des phoques, des harpons, les Inuits, Walt Disney, Wittgenstein, etc. Petit rongeur connu pour l’importance de ses migrations, le lemming serait un adepte du suicide collectif, un mythe démenti par de nombreuses études, mais filmé en 1958 par Walt Disney grâce à des trucages. Le monde est toujours surprenant ! Equipé de feutres colorés et d’un rétroprojecteur, le conférencier enthousiaste nous emporte aux confins du monde connu…
Fuite éperdue dans l’imaginaire
Le Chagrin des Ogres de Fabrice Murgia a déjà été applaudi en France à diverses occasions, et notamment au Festival Impatience du Théâtre de l’Odéon. La pièce met en scène deux jeunes sur le point de quitter l’enfance, tentés par une fuite dans l’imaginaire, en proie au désespoir, comme devant un précipice. Point de départ : un fait divers de 2006 en Allemagne où un jeune garçon, Bastian Bosse, qui tenait un blog sur internet où il a annoncé son geste, pénètre armé dans son lycée, tire alentour et se suicide. Autre protagoniste : Laetitia, qui tient un journal intime sous la forme d’une vidéo et se réveille sur son lit d’hôpital. « Le théâtre est pour moi un lieu d’exploration sensorielle. Dans ce spectacle, l’équipe (vidéo, son, lumière, comédiens…) travaille à traduire sur scène des perceptions sensorielles. » confie le jeune metteur en scène. Stéphane Roussel crée Monocle, Portrait de S. Von Harden, qui se fonde sur le tableau Portrait de la journaliste Sylvia von Harden peint par Otto Dix en 1926, qui marque « l’avènement de la “nouvelle femme“ ». Toute une époque ! Luc Schiltz interprète ce monologue singulier, explorant « l’émanation psychique » de Sylvia et les polarités masculines et féminines. En clôture, des étudiants comédiens issus d’écoles françaises et belges présentent leurs créations. A découvrir !
Agnès Santi
Théâtre en CieS, du 16 novembre au 7 décembre, au Centre Wallonie-Bruxelles, 127-129 rue Saint-Martin, 75004 Paris. Tél : 01 53 01 96 96.