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À l’heure de la réindustrialisation nationale, Made in France explore les rouages parfois peu glorieux qui président à la vie et à la mort d’une usine. Une comédie économico-sociale aussi enlevée qu’instructive.
Ici, tout le monde en prend pour son grade. Syndicalistes, comme milieux politiques ou des affaires, personne dans cette histoire n’a pour boussole le seul intérêt commun mais, au contraire, chacun compose avec ses stratégies personnelles. Il faut dire que pour construire ce Made in France, les deux auteurs et metteurs en scène – Samuel Valensi et Paul-Eloi Forget, également interprètes de cette comédie – ont épluché des rapports parlementaires sur des fermetures d’usine, interviewé des syndicalistes, des salariés, des consultants en stratégie, des avocats et des membres de cabinets ministériels… Au cœur de leurs recherches, les fameuses délocalisations que la tant vantée réindustrialisation de la France ne parvient pas vraiment à freiner. Comment s’enclenchent-elles ? À quelles logiques répondent-elles ? Pourquoi ne parvient-on pas à les empêcher ? En dévoilant ce qui demeure caché, Made in France offre une plongée dans les coulisses de notre vie économique bien peu glorieuse, mais néanmoins drôle.
Un théâtre énergique et joyeux
À l’inverse de ce que le sujet pourrait laisser attendre, Made in France se présente en effet comme une comédie particulièrement enlevée. Rythmée par une batteuse qui occupe avec son instrument le centre de la scène, juchée sur un podium mobile, la pièce tourne parfois même au vaudeville. Notamment dans la première partie où un jeune détenu qui vient de débarquer en stage de réinsertion dans l’usine en devient très vite le conseiller syndical et le potentiel sauveur au prix de quiproquos qui se succèdent à fréquence élevée, en mode crescendo, au rythme des 4 grands panneaux noirs que les 5 interprètes font régulièrement virevolter tels des portes qui claquent. Passé cette mise en place acrobatique, la deuxième partie déroule un fil plus politique où les coulisses des tractations entre les différentes parties réservent également leur lot de rebondissements, de coups fourrés et autres retournements d’alliance avec en ligne de mire la perspective d’une nationalisation de l’usine comme dernière solution. Le tout sans perdre le rythme, dans le tournoiement d’un théâtre simple et énergique, joyeux, qui fait s’entrecroiser une dizaine de personnages hauts en couleur mais pourtant tout à fait vraisemblables. Ainsi, sur un fil entre évocations de l’actualité – allusions aux délocalisations bien sûr, mais aussi à la période Covid et autres discours politiques stéréotypés – et une fiction poussée jusqu’à l’absurde d’un pays dont le tout à l’égout ne fonctionnerait plus, Made in France trace le chemin d’une satire bien trempée, grâce à laquelle on comprend mieux ces décisions économiques dont la logique paraît souvent nous échapper.
Eric Demey
Lundi et mardi à 21h15, dimanche à 20h. Tel : 01 48 06 72 34. Également du 5 au 26 juillet au 11 d’Avignon et en novembre au Théâtre de la Concorde.
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