Les Gens d’à côté
Une exposition photographique, des [...]
Après Adishatz/Adieu en 2009, Jonathan Capdevielle continue d’explorer son passé familial dans Saga. Aux côtés de Marika Dreistadt, Jonathan Drillet et Franck Saurel, le comédien-auteur-metteur en scène signe un docu-fiction problématique.
Qui n’a pas assisté à la performance de Jonathan Capdevielle dans Jerk (solo pour un marionnettiste-ventriloque créé, en 2008, par Gisèle Vienne, d’après un roman de Dennis Cooper) est sans doute passé à côté d’un choc théâtral. En se remémorant la précision avec laquelle ce spectacle maintenait l’équilibre entre tragique, trivial et une forme de distance humoristique extrêmement subtile, on mesure l’écart qui sépare cette proposition magistrale et Saga. La création autofictionnelle dont le jeune artiste signe aujourd’hui le texte (en collaboration avec Sylvie Capdevielle et Jonathan Drillet) ainsi que la mise en scène, nous mène jusqu’aux terres de l’intime, de l’identité : de l’enfance à l’adolescence. On est entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, dans un village des Hautes-Pyrénées. Le frère et la sœur Capdevielle (Jonathan – dit Jojo – et Sylvie) sont les principaux protagonistes d’un quotidien à la fois banal et bancal. Un quotidien qui nous est livré de façon brute, sans mise en perspective dramaturgique, à travers une suite de fondus enchaînés plaçant bout à bout différentes tranches de vie.
Un quotidien à la fois banal et bancal
De ces épisodes, seuls nous parviennent les dialogues aux accents du Sud-ouest. Equipés de micros H-F, les quatre interprètes de Saga se lancent dans deux partitions autonomes et simultanées : la première, vocale, hyperréaliste, à la manière d’un feuilleton radiophonique ; la seconde, visuelle, dont les compositions engendrent des tableaux à tendance conceptuelle. Un ours, par exemple, se transforme en rugbyman, une femme vêtue d’un costume traditionnel gravit une sculpture monumentale en forme de piton rocheux (conçue par Nadia Lauro), unique élément de décor du spectacle. Tout cela crée une matière inégale qui semble vouloir naviguer entre humour, gravité et poésie du quotidien. Mais l’émotion, la sensibilité, la tendresse, même, qui pourraient surgir de cette proposition se perdent dans des effets mal maîtrisés. Car une dérision écrasante, imprécise, l’emporte sur le reste, faisant naître certains rires qui mettent mal à l’aise : rires qui confinent au mépris de classe, rires qui frôlent l’homophobie ordinaire… Manquant de netteté et de ligne directrice, Saga prête le flanc à ces ambiguïtés. Et laisse une étrange, une désagréable impression de malentendu.
Manuel Piolat Soleymat
à 20h30. Durée de la représentation : 1h50. Spectacle vu au Centre Pompidou, à Paris. Tél. : 01 34 20 14 14. www.lapostrophe.net
Maison des arts de Créteil, place Salvador-Allende, 94000 Créteil. Du 14 au 17 avril 2015 à 20h30. Tél. : 01 45 13 19 19. www.maccreteil.com
Egalement le 10 avril 2015 au Manège de Maubeuge-Mons, les 22 et 23 avril à la Scène nationale d’Orléans, les 12 et 13 mai au Quartz – Scène nationale de Brest, les 11 et 12 juin à La Rose des Vents à Villeneuve d’Ascq.