Dom Juan
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Explorant l’Histoire chilienne dans un diptyque, Villa + Discurso, Guillermo Calderon s’interroge sur la mise en œuvre de la mémoire et la construction de l’avenir. Un théâtre politique universel et profondément vivant.
Héritant du traumatisme de la dictature, la génération de Guillermo Calderon, qui a grandi sous le régime de Pinochet, s’interroge sur le sens et le drame de l’Histoire, qui soudain asservit toute une population sous le joug d’une autorité suprême, concentrant en ses mains tous les pouvoirs. Au Chili, justice n’a pas été faite contre les violations des droits de l’homme, ce qui rend d’autant plus impératif de se souvenir et de transmettre, et responsabilise particulièrement ceux qui portent une parole publique. « J’ai toujours considéré la scène comme un lieu idéal pour penser politiquement. » souligne le metteur en scène, invité dans divers festivals internationaux, s’attachant sur le plateau de théâtre à concilier le débat d’idées et la dialectique scénique. « C’est un espace de libre expression de la rage et aussi d’un certain optimisme quant à la capacité de l’art à changer le monde. » confie-t-il encore, assignant au théâtre une mission de mémoire et de réflexion.
Immédiateté du théâtre
L’immédiateté du théâtre permet de questionner l’histoire avec force et vivacité. Conçu pour être joué dans des espaces non-théâtraux (dont d’ex-lieux de détention), le diptyque Villa + Discurso, en deux volets inséparables, met en scène trois jeunes femmes confrontées à la douleur du passé et à la difficulté de prendre en charge l’avenir. Dans Villa, elles doivent prendre une décision : que faire de la Villa Grimaldi, qui fut l’un des principaux centres de torture sous Pinochet ? Musée, mémorial, lieu de témoignages avec archives orales… Le débat très intense reflète ceux qui ont effectivement eu lieu dans le pays. Les trois comédiennes, Francisca Lewin, Macarena Zamudio et Carla Romero font entendre dans Discurso les adieux fictifs de Michelle Bachelet à la fin de son mandat présidentiel (2006-2010). Un discours en forme de bilan où se mêlent les espoirs, les contradictions voire les frustrations d’une femme de pouvoir et d’une partie d’un peuple engagé avec elle dans le deuil actif des blessures du passé et la construction d’un avenir juste. Dépassant le contexte chilien, ces questions dont s’empare la scène concernent à jamais l’histoire de l’humanité tout entière…
Agnès Santi
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