Marie Torreton fait entendre les textes de la rescapée des camps Charlotte Delbo dans « Prière aux vivants ».
Créé à La Scala-Provence l’an passé, le seul [...]
Ali Chahrour met les récits invisibles des femmes migrantes au Liban sous le feu des aveugloirs. Volontairement.
Au Liban, il existe un système « kafala » pour les travailleurs domestiques étrangers (et plus souvent travailleuses venues d’Ethiopie, Soudan, Cameroun…) appelé Kafala qui n’est autre que de l’esclavage moderne. Le « Kafil » que l’on appelle pudiquement « responsable » mais qui signifie dans ce cas, maître ou propriétaire, confisque leurs passeports, leurs téléphones, les privent de droits et les abandonnent dans l’adversité. Chahrour leur donne la parole, tissant une œuvre percutante, un chant de résistance porté par la grâce du geste. Trois femmes – Tenei Ahmad, Zena Moussa et Rania Jamal – qui ont pu fuir ce système, montent sur scène, dans une sobriété extrême, vêtues de noir, leurs corps comme outils de mémoire. Ce qui émerge ici est un théâtre de l’intime, traversé par les récits de violence, de fuite, mais aussi de dignité retrouvée. Ces confidences se fondent dans une composition chorégraphique minimaliste et répétitive, faite de vibrations, de frappes au sol, de souffle haletant, de danses orientales esquissées, de dos qui se cambrent. Elles incarnent un état de tension, une mémoire du corps, une forme d’apnée qui rend palpable l’oppression vécue.
Pour les filles mortes en silence
La bande-son, composée en direct par Abed Kobeissy et chantée par Lynn Adib, constitue la colonne vertébrale du spectacle. Les mélopées s’élèvent comme des lamentations, des poèmes pour les absentes, celles mortes sous les bombardements, enfermées et oubliées. Lorsqu’un voile est déplié à la fin du spectacle, recouvrant Tenei allongée, l’image de la mer devient celle d’un tombeau ouvert : un linceul pour celles à qui l’on a tout volé sauf la dignité. Le titre prend tout son sens, en hommage à ces femmes qui, lors des bombardements de septembre 2024 à Beyrouth, se sont réfugiées sur la côte, abandonnées par leurs employeurs, découvrant la mer pour la première fois, comme symbole tragique d’un espace de liberté. Ali Chahrour signe là une œuvre exigeante et profondément humaine, loin des facilités du théâtre documentaire, Quand j’ai vu la mer s’élève comme une prière pour celles que l’on ne regarde jamais.
Agnès Izrine
à 13h. Tél : 04 90 14 14 14. Durée 1h10.
Créé à La Scala-Provence l’an passé, le seul [...]
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