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Jérôme Thomas met en piste le spectacle de [...]
LA PLACE ROYALE
Liberté vs attachement sentimental. Le directeur du Théâtre de l’Aquarium met en scène La Place Royale de Pierre Corneille. Quand un groupe de jeunes gens se heurte aux dilemmes de l’amour…
« La Place Royale (notre actuelle Place des Vosges) est d’abord le théâtre des amours, des ambitions et des désarrois d’une jeunesse aristocratique au seuil de l’âge adulte, au carrefour des grands choix décisifs pour la vie. Car ces jeunes gens, comme toutes les figures qu’inventera Corneille, sont travaillés par une question essentielle : comment être auteur de son propre destin ? Comme vivre pleinement à travers soi, affranchi de toute détermination (familiale, sociale voire naturelle – l’être humain étant par naissance lié, ligoté au temps, au corps, aux plaisirs de la vie et à la peur de la mort) ? Question d’autant plus délicate quand on est justement pris, ébloui, envahi par le désir amoureux qui, par définition, met hors de soi. Dans cette pièce extraordinaire de vivacité et de violence mêlées, les réponses sont aussi diverses que radicales. Il y a Alidor, qui vit l’amour comme une menace pour sa liberté, et qui cherche, du coup, à s’arracher à tout prix à la femme de sa vie ! Laquelle, Angélique, à l’inverse, ne vit l’amour que comme don total de soi, et rêve de fusion avec Alidor.
La tension entre hier et aujourd’hui
Cléandre, lui, est toujours prêt à se sacrifier devant autrui au nom de l’amitié, quitte à se perdre. Quant à Phylis, inquiète pour sa liberté de femme (car ce sont ses parents qui lui choisiront un mari), elle n’a trouvé d’autre solution, en attendant, que de se donner à tous les hommes afin de ne se donner à personne. Mais aucune de ces postures, aussi affirmée soit-elle, ne trouvera grâce face aux aléas de la vie… Monter “un classique”, écrit il y a 2, 5 ou 25 siècles, n’a de sens que s’il fait toujours sens pour nous aujourd’hui. Cela, même si le miroir qu’il nous tend appartient à une époque passée, avec sa langue, son fond culturel, religieux, politique… Il serait naïf de croire que nous pensons, que nous respirons exactement comme ces jeunes aristos imaginés par Corneille en 1634. La scénographie imaginée par Raymond Sarti dit exactement (et très simplement) cette tension, cet écart entre hier et aujourd’hui : un vaste carré de parquet « à la Versaillaise » cerné par l’espace contemporain des coulisses (avec tables de maquillage). Dans cet espace, les comédiens se préparent, prêts à bondir sur le “ring central”, pour faire s’entrechoquer les corps et les passions… »
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat
Du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 16h. Durée de la représentation : 2h. Tél. : 01 43 74 99 61. www.theatredelaquarium.com.
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