Les Safra’numériques, un festival dirigé par Ikbal Ben Khalfallah
Dirigée depuis 2015 par Ikbal Ben Khalfallah, [...]
Il y a cinq ans, le comédien et metteur en scène iranien Gurshad Shaheman se faisait connaître en France avec Pourama Pourama. Un passionnant triptyque autofictionnel traversé par les questions du genre et de l’exil, qu’il continue de porter avec force et générosité.
C’est avec ce triptyque autofictionnel que Gurshad Shaheman se présentait pour la première fois en 2014 au public français. Et grâce auquel il continue de garder un rapport régulier au plateau. En voyant aujourd’hui cette pièce, on comprend pourquoi l’artiste a ressenti le besoin de créer ensuite Il pourra toujours dire que c’est pour l’amour du prophète, un oratorio créé l’an dernier avec de jeunes comédiens. On mesure d’autant mieux la profondeur de sa recherche autour du genre, de la sexualité et de l’exil. Dans cette première pièce, le comédien et metteur en scène dit en effet déjà la transgression des normes sociales en mêlant théâtre, installation sonore et performance. Grâce à trois dispositifs singuliers, il met en scène la difficulté à s’exprimer sur un plateau lorsque l’on est Autre. Lorsque notre identité dépasse les bornes habituelles.
La conquête d’un « je »
Pourama Pourama n’aurait pas pu voir le jour en Iran, d’où est originaire Gurshad Shaheman. Une évidence que celui-ci n’a guère besoin de formuler : le choix du français comme langue d’écriture est suffisamment éloquent. De même que la relation complexe qu’entretiennent dans Touch me, Taste me et Trade me, les trois parties du spectacle, présence physique et narration. Ce sont les mots qui priment dans Touch me. En voix off, dans une obscurité totale, ils en occupent les dix premières minutes. Beaux et simples, ils évoquent la révolution des Ayatollah, que les parents de Gurshad ont fuie alors qu’il n’avait que douze ans. Pourama Pourama tend au dépassement sans doute impossible de ce traumatisme initial. À l’affirmation d’une identité trans susceptible de s’accommoder des failles laissées par l’exil, dans laquelle les spectateurs jouent un rôle central. D’abord appelés à toucher le comédien pour l’encourager à poursuivre le récit de son enfance, nous sommes ensuite invités à dîner tandis que l’artiste vêtu d’une robe scintillante nous raconte son éveil à la sexualité. Avant de le rejoindre dans une cage semi-opaque pour l’écouter nous confier un épisode de prostitution. Autant d’étapes bouleversantes vers la construction, vers la conquête d’un « je ».
Anaïs Heluin
Le vendredi à 19h, samedi à 18h et dimanche à 17h. Tel : 01 48 70 48 90. www.nouveau-theatre-montreuil.com. Également les 3 et 4 avril 2019 au Théâtre du Manège à Maubeuge.
Dirigée depuis 2015 par Ikbal Ben Khalfallah, [...]