Christian Benedetti met en scène Guerre, de Lars Norén.
Christian Benedetti interroge l’indicible de [...]
Philippe Calvario adapte et modernise le trio amoureux et assassin imaginé par Strindberg. Malgré la sincérité de l’engagement scénique, l’exacerbation du jeu et l’affectation des postures saturent la représentation.
Disparue de la nomenclature psychiatrique, l’hystérie n’a pas totalement déserté les théâtres. Philippe Calvario la fait revenir en force dans son adaptation et sa mise en scène de Créanciers. Dans la version originale de la pièce de Strindberg, Adolf est peintre, Tekla est écrivaine et Gustaf est professeur. En bonne hystérique, Tekla a « fabriqué un homme qui serait animé du désir de savoir », comme disait Lacan, et ses deux maris successifs, Gustaf puis Adolf, incarnent à merveille les maîtres qui l’ont formée et sur lesquels elle tâche de régner. Dans l’adaptation de Philippe Calvario, Julie Debazac est une actrice vieillissante passée du théâtre au cinéma. Elle délaisse le désir artistique de son metteur en scène de mari, d’emblée castré puisque rebaptisé Al. Benjamin Baroche est Gus, le premier mari de Tekla. Acteur reconnu, il cache à Al qu’il a été le premier pygmalion de celle qui est devenu l’unique objet de son ressentiment et qu’il entreprend de détruire en nourrissant le délire de persécution et l’angoisse d’abandon de son second époux. Pourquoi pas.
Confusion des sentiments
Les trois personnages sont interprétés sur le même ton et la mise en scène n’explore pas l’évolution de leurs rapports. Philippe Calvario réduit le trio à la rencontre entre trois hystériques : on a l’impression d’assister à la bataille entre trois mouettes. La pulsion de mort vampirise la scène. Les cris, les sauts de chaise en canapé et les gestes nerveux qui finissent en catalepsie à force d’énervement transforment la pièce en bal des folles, comme chez Charcot. Benjamin Baroche, Philippe Calvario et Julie Debazac sont enfermés dans un jeu exalté et l’on peine à comprendre qui est le manipulateur et qui est la victime. La révélation finale est incongrue, tant elle rompt avec la modalité générale qui oscille entre le geignement et la piaillerie. Les atermoiements de ces artistes transformés en enfants malades à la sophistication minaudière semblent de façade. Le renfort illustratif de la musique, inutilement didactique, ne permet pas d’éclairer ce jeu de massacre exténuant.
Catherine Robert
Du jeudi au samedi à 19h ; samedi et dimanche à 14h30. Tél. : 01 48 08 39 74. A partir de 14 ans. Durée : 1h30.
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