La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Munich-Athènes

La rencontre du flamenco et de la poésie dans la voix de Vicente Pradal.

Publié le 10 mars 2007 - N° 146

Charlène Lyczba chorégraphie les affects d’un couple disséquant sa passion
tout au long d’une modification ferroviaire haute en cris et en couleurs.

Entre déchirements violents et réconciliation en feux d’artifice, Sarah et
David expérimentent les modulations incandescentes de l’amour vache. Ils
s’aiment mais leur amour a besoin de la doléance, de l’accusation injuste, de
l’opposition virulente, de la blessure et du grief pour s’exprimer. Entre la
peur de s’engager, la crainte de l’autre et l’incertitude de soi, apparaît
l’intensité d’une relation qui a du mal à admettre la joie de l’évidence. De
Munich à Athènes, le couple traverse l’Europe de l’Est par Zagreb. Dans le
compartiment inconfortable où les corps se heurtent, la vérité se fait jour peu
à peu, à mesure qu’avance la nuit et que la torpeur alcoolique gagne les amants.
A la fois « représentation du couple originel et celui qui inventera le monde
à venir »
, d’après Charlène Lyczba, Sarah et David passent en revue toutes
les postures amoureuses, en une sorte de Kâma-Sûtra sadique où rien n?est
épargné à l’autre, de l’insulte à la cystique revendiquée, de l’odeur de sueur
aux reproches de pingrerie, ultime symbole de l’incapacité à assumer la
simplicité du don et de l’accueil intersubjectif.

Arène des c’urs et des corps

De cette relation agonistique, Charlène Lyczba ne cache rien. Si les panneaux
qui entourent la scène reçoivent des projections oniriques qui offrent un asile
à la beauté, le sol est bientôt jonché de tous les débris du conflit jusqu’à ce
que les draps de la concorde recouvrent les éclats des heurts du ménage. Partant
d’une évocation très réaliste, soutenue par des images de gare et de voies
ferrées, la scénographie évolue peu à peu vers une abstraction plus grande,
donnant l’impression d’une plongée progressive dans l’introspection où les
personnages cherchent à percer le sens et l’intensité de leur engagement. Sophie
Carrier et Nicolas Melocco, à l’instar de taurillons furieux, hurlent le malaise
et la difficulté existentielle de leurs personnages qui peinent à transformer le
coup en caresse. Jan Olszewski complète la distribution de ce huis clos
mortifère, incarnant un contrôleur inquiétant, témoin et relais des ravages de
la passion dont ce spectacle décrit les halètements impétueux.

Catherine Robert

Munich-Athènes, de Lars Norén ; mise en scène de Charlène Lyczba. Du 30
janvier au 24 mars 2007. Du mardi au samedi à 20h30. Kiron Espace, 10, rue de la
Vacquerie, 75011 Paris. Réservations au 01 44 64 11 50.

A propos de l'événement


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