Audrey Bertrand met en scène l’hypermarché comme miroir social dans « Au Pays des Hypers ».
Mêlant l’écriture journalistique de Florence [...]
Les souffles facétieux et poétiques d’un texte. La puissance insolite d’un grand comédien. Le dépouillement inspiré d’une mise en scène exemplaire. À Présence Pasteur, les mots et les obsessions du Bizarre nous amènent au plus singulier de l’expérience de vivre.
« Holà ! Holà, j’ai pas mouru depuis longtemps moi. Faudrait que je meure un peu, avant que ça me passe. D’agonie sévère, mettons, pour pas changer. Je sais pas comment ça est pour vous, mais si je ne meurs pas régulièrement, ça m’encombre, j’ai des renvois, je suis pas bien. » En quelques phrases, plongés dans une pénombre à la fois lourde et engageante, nous voici déjà renversés par la matière insolite d’une langue comme surgie d’un arrière-pays du quotidien. De l’existence. Du vivant. Un homme se met à parler. Pas n’importe lequel. Il est assis sur une chaise, contre un mur, de profil, le regard lancé droit devant lui, le visage et le corps habités par toutes sortes d’embarras. La présence unique de Roland Vouilloz, pour qui Fabrice Melquiot a écrit Le Bizarre, sa façon si particulière de dire puis subitement de se taire, de sculpter la matière brute des mots et des silences nous aimante. Il nous tire vers les aspects rugueux d’une solitude. Celle du personnage hors du commun qu’il incarne sur le plateau de Présence Pasteur : sans doute l’un des êtres de théâtre les plus authentiquement intenses de l’édition 2025 d’Avignon Off.
Un don inestimable
La manière qu’il a d’évoquer constamment son trépas et sa résurrection résonne comme un leitmotiv. S’agit-il d’une façon de s’abstraire du réel pour pouvoir assumer les états éparpillés de sa conscience ? Cet homme aux dilemmes déchirants prend la parole pour nous raconter comment il a rencontré Isabelle, dans un supermarché, comment il l’a invitée chez lui pour manger du poulet. Il est en train de l’attendre. A-t-elle sonné à la porte ou fantasme-t-il cette rencontre intranquille ? Dans Le Bizarre, rien n’est jamais sûr. Mais tout est fort, surprenant, d’une beauté coincée entre drôlerie et drame. La mise en scène à la rigueur absolue pensée par Jean-Yves Ruf (l’espace nu qu’il propose se passe de tout accessoire, tout élément de décor) crée les circonstances rêvées des confidences qui nous parviennent. « Des fois, je rêve que je me trouve. Je me trouve. Et je suis bien emmerdé, parce que je sais pas quoi faire de moi », admet celui qui dit ne pas s’appeler Michel, avant de l’affirmer. L’étrangeté qu’il révèle est pourtant un don inestimable. Un acte de résistance aux assauts délétères du mainstream et du conformisme ambiants.
Manuel Piolat Soleymat
à 18h15. Relâche le mardi. Tél. 04 32 74 18 54. Durée : 1h05.
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