L’Avare
Avec Jacques Weber dans le rôle-titre, [...]
Un spectacle pour lequel le spectateur fixe lui-même son prix d’entrée ! Bienvenue dans le NoShow, qui traite des conditions d’exercice du spectacle vivant dans un théâtre interactif et ludique venu du Québec.
Ici comme ailleurs, et au Québec encore plus qu’en France, l’argent manque à la culture, et plus particulièrement au spectacle vivant. Chez nos cousins d’Amérique du Nord, pas de système d’intermittence, si bien que les comédiens doublent le plus souvent leur travail d’un petit boulot alimentaire. Le NoShow poursuit la courageuse ambition de sensibiliser le public aux conditions dans lesquelles les artistes exercent leur métier. La tâche pourrait paraître austère – elle prend d’ailleurs la forme officielle d’une sorte de congrès d’actionnaires – mais elle donne lieu au contraire à un spectacle bourré d’énergie, inventif et faisant feu de tout bois, grâce à la réunion de deux compagnies québécoises, le collectif Nous sommes ici et le théâtre Dubunker.
Une réalité cruelle
Présenté aux Francophonies à Limoges, puis dans le cadre du festival Novart à Bordeaux, qui fait peau neuve sous l’impulsion de Sylvie Violan, le Noshow ravira sans doute le public adolescent. Prix d’entrée libre, vote par sms pour choisir les acteurs qui restent sur scène, spectateur convié sur le plateau et, pour finir, bataille géante de marshmallows, le NoShow fait le show en impliquant largement le public dans le spectacle. Sur le plateau, les acteurs élus par le vote SMS évoquent des épisodes – réels ou fictifs ? – de leur vie de comédien, tandis que les exclus font grève et, relayés par la vidéo, manifestent en direct à l’extérieur du théâtre. L’ensemble donne l’image d’un monde où les rêves préalables à l’entrée dans le métier se heurtent ensuite à une réalité cruelle : concurrence féroce, système machiste, extrême difficulté à durer dans un monde où certains vous caricaturent en assistés fainéants… Dans ce contexte, deux ressorts poussent sans doute la troupe à rechercher sans cesse l’énergie et l’amusement : éviter l’écueil d’un traitement plaintif du sujet et une culture nord-américaine d’un théâtre qui se prend peut-être un peu moins au sérieux qu’ici. Si bien que certains passages fonctionnent tandis que d’autres pourront agacer celui qui n’est plus adolescent. Scènes attendues, réflexion superficielle sur le métier, sur le théâtre en général, et recyclage des formules de l’entertainment brouillent la qualité du spectacle. Submergés par les rires et l’excitation alentour, vous pourriez finalement vous interroger sur votre caractère un peu tiède, le temps passant. Mais demeure la sensibilisation à la question du subventionnement du spectacle vivant qui, fût-elle parfois maladroite, n’en demeure pas moins efficace.
Eric Demey
à 19h, dimanche à 15h30. Tel : 01 40 03 72 23. Durée : 2h15. Spectacle vu au Théâtre Les Colonnes, Bordeaux Métropole.