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Le MIDSUMMER FESTIVAL du Château d’Hardelot fête ses dix ans. L’écoute cordiale.

Le MIDSUMMER FESTIVAL du Château d’Hardelot fête ses dix ans. L’écoute cordiale. - Critique sortie Classique / Opéra Condette Château d'Hardelot
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Le théâtre élisabéthain du Chateau d'Hardelot © M.Argyroglo

FESTIVAL / PAS DE CALAIS

Publié le 19 juin 2019 - N° 277

Ce festival au nom poétique inspiré par Shakespeare en personne (et sa pièce A Midsummer Night’s Dream) explore et célèbre depuis dix ans les liens musicaux qui unissent la France et la Grande-Bretagne. La programmation se décline en trois week-ends au mois de juin, jouant la carte de l’enchantement face à la nature, en multipliant des rendez-vous informels et chaleureux, tout en convoquant les mélomanes les plus exigeants à des créations inattendues qui nous feront, pour cette édition-anniversaire, remonter aux sources mêmes de l’opéra anglais, avec deux productions des plus attendues consacrées à Didon et Enée de Purcell et Psyché de Matthew Locke.

ENTRETIEN SÉBASTIEN MAHIEUXE
RENCONTRE AVEC LE DIRECTEUR ARTISTIQUE DU MIDSUMMER FESTIVAL

Le directeur artistique du Midsummer Festival évoque les grands axes artistiques autour desquels s’organise sa programmation, mais aussi ce lieu de spectacle unique en France qu’est le théâtre élisabéthain, récemment inauguré sur le site du château d’Hardelot.

Quel est le projet artistique général du festival ?

Sébastien Mahieuxe : Le festival est d’abord lié à l’identité du château d’Hardelot, marquée par les liens historiques entre la France et la Grande-Bretagne. Le nom même du festival évoque la pièce de Shakespeare, A Midsummer Night’s Dream qui se déroule la nuit du solstice d’été. C’est précisément à cette période au fort potentiel d’évocation poétique que se déroule le festival.

Qu’avez-vous voulu mettre en avant en 2019 ?
Sébastien Mahieuxe :
Depuis sa création, le Midsummer Festival est l’occasion de mettre à jour les liens étroits qui unissent les musiques anglaise et française. Cette 10e édition explore les débuts de l’opéra anglais avec Didon et Enée de Purcell – un tube ! – et avec Psyché de Matthew Locke, l’un des tous premiers opéras d’Outre-Manche, rarement joué et qui doit beaucoup à l’esprit français. Venir au Midsummer Festival, c’est aussi vivre une expérience. On est d’emblée charmé par la beauté des lieux, propice à susciter l’esprit de curiosité : un château aux abords de magnifiques espaces naturels, non loin d’une plage de sable immense. A côté des concerts et spectacles du soir au théâtre, les jardins bruissent de musiques et de contes, la musique dialogue avec la nature lors de balades matinales en forêt, la traditionnelle cup of tea est servie à 17h alors que les afters prolongent les premiers soirs d’été.

« Le Midsummer Festival est l’occasion de mettre à jour les liens étroits qui unissent les musiques anglaise et française. »

Le directeur artistique que vous êtes bénéficie d’un outil formidable qui est le théâtre élisabéthain. Quelle influence exerce sur votre programmation l’existence même de ce théâtre ?

Sébastien Mahieuxe : C’est un théâtre unique en France. Quand on entre dans la salle, le bois est partout et on se souvient de la formule de Shakespeare pour désigner son Théâtre du Globe : « This wooden O » (Ce O de bois). On retrouve la forme circulaire caractéristique des théâtres élisabéthains, les galeries qui encerclent la scène ou le mur de scène avec sa tribune. Une fosse d’orchestre permet la représentation de formes lyriques. On y ressent une intimité évidente entre la salle et la scène. Les jardins du château encerclent le théâtre d’où l’on aperçoit le lac et la forêt. Aussi, j’ai souhaité développer en ces lieux une programmation qui évoque ce rapport à la nature que conte les récits antiques. C’est une source inépuisable d’inspiration pour les musiciens et poètes, d’Ovide à Shakespeare ou de Purcell à Lully.

Propos recueillis par Jean Lukas.

Aux sources de l’opéra anglais

Pour son dixième anniversaire, le Midsummer poursuit sa célébration de l’opéra baroque en particulier avec la création d’une nouvelle version, complétée par le chef Sébastien Daucé à la tête de son Ensemble Correspondances, du Psyché de Matthew Locke
Rencontre avec le chef d’orchestre Sébastien Daucé.

On considère Psyché comme un moment décisif de l’opéra anglais…
Sébastien Daucé :
Oui, car c’est la première fois que l’on parle réellement « d’opéra » en Angleterre. À cette époque, il y a un désir des rois anglais de s’approprier ce genre nouveau, afin de pouvoir rivaliser avec les cours étrangères, notamment la France avec Lully. C’est donc un double enjeu esthétique et politique qui va conduire à la commande de Psyché, première tentative anglaise dans le domaine de l’opéra, publiée dans le recueil “The English Opera”.

Comment cette musique, dont on dit qu’une partie est perdue, vous est-elle parvenue ?
Sébastien Daucé :
À l’origine, deux compositeurs se sont associés pour répondre à cette commande royale : Matthew Locke et Giovanni Battista Draghi. Seule la musique de Locke, publiée à sa création en 1675, nous est parvenue. Le défi, c’était donc de reconstruire un opéra complet en complétant avec des musiques issues du théâtre anglais de l’époque. Pour cela, nous avons puisé dans un manuscrit conservé à New York contenant beaucoup de morceaux de danse du 17ème, supposément proches des pièces de Draghi. Puis nous nous sommes aidés des indications détaillées du livret sur le caractère et l’instrumentation pour les intégrer le plus justement possible dans notre relecture de Psyché.

« Locke est un génie disruptif qui appartient à cette zone d’ombre entre Dowland et Purcell. »

Parlez-nous de la musique de Matthew Locke…
Sébastien Daucé :
Locke est un génie disruptif qui appartient à cette zone d’ombre entre Dowland et Purcell sur laquelle on connaît peu de choses, où l’influence française est très forte. C’est une musique étrange, qui constitue un nouveau langage pour nous, tout en possédant des caractéristiques du ballet de cour. Les lignes sont complètement éclatées, l’on en vient à se demander à chaque mesure s’il n’y a pas d’erreur… C’est en prenant peu à peu conscience que ce n’en sont pas, que l’on commence à percevoir pleinement le génie de cette musique !

Propos recueillis par Julien Hanck

Samedi 29 juin à 20h30

A propos de l'événement

Midsummer Festival
du vendredi 14 juin 2019 au samedi 29 juin 2019
Château d'Hardelot
Château d'Hardelot Centre culturel de l'Entente cordiale, 1 rue de la Source 62360 Condette. Tel. 03 21 21 73 65.

Places : de 3 à 17 €.
www.chateau-hardelot.fr

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