L’institut Benjamenta
« Être insignifiant et le rester. » Telle est [...]
Avignon / 2016 - Entretien / Marie Vialle
Une boîte noire, au sein de laquelle une comédienne (Marie Vialle), un écrivain (Pascal Quignard) et deux oiseaux font l’expérience de l’obscurité. De la possession. De la métamorphose. Une performance à la lisière du chamanisme, dédiée à la mémoire de la chorégraphe et danseuse Carlotta Ikeda.
« L’écriture de Pascal Quignard a un rythme et une langue à part, extrêmement particuliers, avec des à-coups, des sortes d’instabilités. C’est cela qui m’a immédiatement plu, lorsque je l’ai découverte. Et cela m’a donné envie de la mettre en scène (ndlr, Marie Vialle a créé trois œuvres de l’écrivain). Je trouve aussi que, dans ses textes, les personnages féminins sont très libres. Ils suivent de près leurs désirs. Cette dimension me touche énormément. La relation qui nous lie, Pascal et moi, depuis une dizaine d’années, m’est très précieuse. Nous avons toujours une grande joie et un grand amusement à fabriquer des choses ensemble. Nous fonctionnons sur un double mode : avec des moments de partage, de grande complicité, et d’autres où nous sommes à distance, solitaires. Car nous avons chacun un grand respect des périodes où nous travaillons l’un sans l’autre : lui à l’écriture, moi à la mise en scène ou l’interprétation. La Rive dans le noir est le premier spectacle pour lequel nous sommes tous les deux sur le plateau. Il est né à la suite de la disparition de Carlotta Ikeda, en 2014.
Des poussées de musiques, d’images, de présences, de textes…
Pascal était très lié à elle. Ils ont effectué une longue tournée ensemble, à l’occasion d’un spectacle sur Médée. Je crois qu’il a eu envie de poursuivre cette expérience du plateau avec moi. C’était aussi une façon, pour lui, de rendre hommage à Carlotta Ikeda. Il a écrit La Rive dans le noir, avec l’idée que nous partagions tous les deux la scène avec des oiseaux : un corbeau et une chouette effraie. Dans ce spectacle, Pascal fait revenir des personnes, des êtres ancestraux, des sons d’oiseaux, des souvenirs. Car pour lui, le théâtre, c’est ça : c’est faire revenir des choses. On est donc un peu comme dans un rêve. On assiste à des poussées de musiques, de bruits, d’images, de présences, de textes… Le fait d’être en scène avec des oiseaux est quelque chose de très fort pour moi. Des oiseaux qui accomplissent, au fur et à mesure qu’avance la représentation, des apparitions de plus en plus surprenantes. La Rive dans le noir nous ramène à quelque chose d’archaïque, nous place, au sein du monde du vivant, au même endroit que ces animaux. »
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat
à 18h, relâche le 11. Tél : 04 90 14 14 14. Durée : 1h15.
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