La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2009 Entretien Claude Lechat

La question de la relation au coeur des enjeux

La question de la relation au coeur des enjeux - Critique sortie Avignon / 2009

Publié le 10 juillet 2009

Président de l’Association des Directeurs des Affaires Culturelles d’ile-de-France (Asdac-idf), Claude Lechat explique son point de vue sur la réforme des collectivités territoriales et avance des pistes de réflexion pour l’avenir.

Selon vous quel va être l’impact des réformes sur le monde artistique et culturel ?
Claude Lechat :
La réforme des Collectivités territoriales et de leur financement est un révélateur. Elle témoigne de la volonté du gouvernement de contraindre les Collectivités territoriales sur leurs compétences obligatoires afin qu’elles deviennent, de fait, des outils de gestion de l’Etat. Cette réforme est, avant d’être un moyen de rationalisation budgétaire, une remise en cause de la décentralisation. Elle est une crispation face à ce vaste mouvement de société qui aspire au rapprochement de l’expertise et de la décision du citoyen. Elle tente de stériliser l’initiative locale, territoire par excellence de l’expérimentation de ces nouvelles formes de gouvernance. Mais la réforme des collectivités territoriales met aussi en évidence l’inadaptation de nos structures de réflexion et de travail aux questions légitimes et urgentes qui nous sont posées.

« La question est de moins en moins l’autorité des uns sur les autres et de plus en plus la capacité des uns et des autres de créer les modalités d’intelligence collective. »

Quelles nouvelles relations se tissent entre les acteurs des territoires, dans des perspectives de coopération interterritoriales, transfrontalières et internationales ?
C. L. :
Dans quelle instance en effet les professionnels de la culture des régions, des Conseils Généraux, des villes et des pays se retrouvent-ils pour élaborer des propositions sur la gouvernance entre les niveaux des Collectivités territoriales, sur les complémentarités, le partage de l’expertise ? Nulle part ! Et nous nous retrouvons avec des élus contestant la réforme, bien conscients des enjeux mais souvent dans l’incapacité de faire des contre-propositions et de rentrer en dialogue avec le gouvernement. Nous ne faisons que renvoyer les balles, du  fond du court au moment même où il nous faudrait être offensif. Pourtant, le pire n’est jamais sûr. Nous avons bien vu en Mai, aux Assises des directeurs des affaires culturelles de Toulouse, que chacun est conscient des enjeux, que les universitaires théorisent, les professionnels expérimentent, et que la profession tente de s’organiser en fédération pour donner les moyens aux élus d’apporter des réponses. Ces problématiques interrogent toutes la question de la relation :  relations entre les niveaux de Collectivités territoriales, entre les acteurs culturels, entre l’offre culturelle et les habitants. La question est de moins en moins l’autorité des uns sur les autres et de plus en plus la capacité des uns et des autres de créer les modalités d’intelligence collective, de poser les bonnes questions, de mettre en mouvement.

Quel nouveau modèle d’action publique en faveur de la culture semble se dessiner et comment jugez-vous son évolution ?
C. L. :
  Avec la théorisation des concepts de Villes créatives, de Haute Qualité Artistique et Culturelle (HQAC) – un cadre de travail qui rend possible l’intégration des pratiques artistiques et de la dimension culturelle dans les processus de développement urbain -, et d’agenda 21 culture – document à vocation mondiale qui prend le pari d’établir les bases d’un engagement des villes et des gouvernements locaux en faveur du développement culturel –  , de formidables outils sont à notre disposition, des méthodologies se dessinent, des valeurs sont affirmées, de nouveaux réseaux se tissent. Et le Directeur des Affaires Culturelles, à l’articulation de l’aménagement du territoire, de l’économie, de l’éducation et du culturel devient un des chefs d’orchestre des politiques publiques avec le succès que l’on sait : Lille, Bilbao, Lyon, etc. Malgré les difficultés grandissantes, un nouveau modèle  de l’action publique en faveur de la culture se dessine, moins centré sur le primat des disciplines artistiques et particulièrement du spectacle vivant. Il s’agit désormais de donner à chacun les moyens de s’exprimer  – par l’éducation artistique -, d’éduquer sa sensibilité  – par la circulation des imaginaires -, de comprendre le monde – par l’accès aux savoirs -,et de prendre part à sa transformation  – par la co-production des œuvres. L’intelligence et les budgets doivent sans doute être en partie désormais mobilisés sur ces nouveaux enjeux qui ne sont rien moins que reconstruire le lieu où s’élabore le contrat social de demain.

Propos recueillis par Agnès Santi

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