Le Voyage de Miriam Frisch
La fondatrice de la Compagnie Hanna R mêle [...]
Daniel Jeanneteau met en scène une très belle Ménagerie de verre, où se croisent beauté scénographique, intelligence scénique et excellence du jeu.
En 2011, Daniel Jeanneteau a mis en scène La Ménagerie de verre au Japon, à l’invitation de Satoshi Miyagi. Puis il a rapatrié le spectacle dans une distribution française de haute volée. Ainsi, à voir Dominique Reymond incarner une mère à l’affection tyrannique et à la folie aussi enfantine que perverse ; à voir Olivier Werner en fils aîné tantôt défait, tantôt résistant, sur le point de s’échapper de l’étouffoir familial ; à voir Solène Arbel en jeune fille fragile comme les animaux de verre qu’elle collectionne, au bord de l’absence au monde ; à voir enfin Pierric Plathier en Jim O’Connor, l’invité d’un soir, aussi conventionnel que son nom l’indique, capable de basculer dans la magie d’une rencontre hors-normes avant de se reprendre, on se dit que les partitions écrites par Tennessee Williams font le régal des acteurs, mais aussi que Daniel Jeanneteau a su admirablement bien les diriger. Lentement, loin les uns des autres, se déplaçant sans se toucher, presque sans se voir, comme en suspension sur un sol duveteux, ils dansent les mouvements qui traversent leurs corps, pèsent leurs mots, et confèrent au texte de Tennessee Williams une extraordinaire épaisseur.
Une grande réussite
Ce texte, c’est la première pièce du célèbre auteur américain, celle qui le révéla et qu’il conçut d’abord comme un scénario. A Saint-Louis, la maison des Wingfield est hantée par l’absence du père, étouffée par une mère fantasque qui radote ses rêves de jeune fille et surprotège « petite soeur », jeune fille infirme, on ne sait pas très bien de quoi. Entre elles, Tom, le grand frère, travaille dans une fabrique de chaussures mais rêve d’écriture, d’aventure, de marine marchande et de cinéma. C’est son amour pour sa sœur qui le retient à la maison. Le substrat autobiographique est fort dans ce récit, les liens nombreux avec la vie de Tennessee Williams, mais, pour autant, La Ménagerie de verre s’éloigne du réalisme auquel on associe souvent l’auteur d’Un tramway nommé désir. Le jeu, les effets de son et de lumière et la scénographie très simple et très belle – un plateau carré entouré de rideaux blancs translucides, une lampe en ombelle qui flotte comme une méduse – maintiennent l’action dans une forme d’irréalité. Les événements ne se déroulent jamais comme on les attend, les personnages sont mouvants, surprenants. Et terriblement humains. Une grande réussite.
Eric Demey
lundi, mercredi, jeudi et vendredi à 20h, samedi à 18h et dimanche à 16h. Tél : 01 41 32 26 26. Durée : 2h15.
La fondatrice de la Compagnie Hanna R mêle [...]