Déluge
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Avignon / 2016 - Entretien / Marco Layera
Le chilien Marco Layera, qui avait l’an dernier défrayé la chronique avec son irrévérencieux La Imaginacion del futuro consacré à Salvador Allende, est de retour avec un spectacle qui risque encore de fâcher : La Dictature du cool.
Avec ce spectacle, vous dites vouloir vous attaquer aux bobos ?
Marco Layera : Oui, mais les bobos, ce n’est pas qu’une réalité française. C’est une catégorie sociale également présente au Chili et partout dans le monde. Je souhaite parler des gens qui sont capables d’avoir des revendications progressistes tout en tirant bénéfice du système capitaliste. Ce sujet vient de notre vécu de troupe : à la fin des spectacles on parle de choses terribles tout en buvant un verre de champagne.
Pourquoi avoir choisi ce sujet ?
M.L. : Le système nous permet d’être heureux même si on ne fait rien pour l’améliorer. Aujourd’hui, on peut se donner bonne conscience en consommant bio ou en allant voir des spectacles sur les problèmes en Afrique. On exerce une participation politique à travers la consommation et la culture. En plus, on exige de chacun d’avoir une opinion. Sur les réseaux sociaux, on crée une image de soi positive, d’une personne solidaire et douée d’une vraie conscience sociale. Finalement, nous sommes tous des gens bien mais rien ne bouge. C’était intéressant de voir comment le système a pu créer cela.
« La réalité sera toujours excessive et absurde dans nos spectacles. »
Comment allez-vous procéder pour exercer cette analyse critique sur scène ?
M.L. : Pour refléter la réalité, il faut la transfigurer. Sur scène, nous faisons apparaître des monstres, dont on peut toutefois se dire qu’ils existent. La dictature du cool sera centrée autour d’un personnage inspiré par le Misanthrope de Molière. C’est le nouveau ministre de la Culture – il faut dire qu’au Chili, nous n’en avons pas – et il vient d’être nommé. Tout son entourage est venu fêter cela, mais il ne veut pas sortir de sa chambre. Il est dégoûté par l’hypocrisie du milieu, par l’art contemporain et sa prétention à changer le monde. Il ne veut pas descendre et pendant ce temps, dehors, manifestations et protestations se multiplient à l’occasion du 1er mai…
Cette pièce risque-t-elle d’être encore une fois explosive ?
M.L. : La réalité sera toujours excessive et absurde dans nos spectacles. Mais ce n’est pas un effet gratuit. Nous travaillons avec l’idée qu’au théâtre tout peut arriver. Ce doit être une grande fête de l’excès, pour constituer un espace à la fois de réflexion et de provocation.
Propos recueillis par Eric Demey et traduits de l’espagnol par Benjamín Westfall
à 18h, relâche le 22. Tél. : 04 90 14 14 14. Durée : 1h25.
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