Les Nègres
Le metteur en scène Robert Wilson donne sa [...]
La Noce de Bertolt Brecht ; Derniers remords avant l’oubli de Jean-Luc Lagarce ; Nous sommes seuls maintenant du collectif In Vitro : d’une décennie à l’autre, la metteuse en scène Julie Deliquet nous invite à un « voyage généalogique ».
Qu’est-ce qui a motivé la création du collectif In Vitro, en 2009 ?
Julie Deliquet : Avant cela, je sentais qu’une fois l’excitation des répétitions passée, je m’ennuyais. Quelque chose était fini pour moi. Alors j’ai arrêté. Puis en 2009, je me suis rendue compte qu’autour de moi, beaucoup d’acteurs formidables travaillaient peu ou mal. Je les ai donc réunis en redéfinissant la place et la responsabilité de chacun. Tout cela s’est fait à l’instinct. Nous avons mis du temps avant de mettre des mots sur notre identité : un théâtre pauvre, des acteurs, des textes et des séances d’improvisations… Je me définis comme « une metteuse en scène-spectatrice ». J’aime être dépossédée de mon spectacle, observer mes acteurs construire en direct, assister à leurs trouvailles et aux accidents : là je ne m’ennuie plus !
Quelle avancée dans le monde des rapports familiaux et humains dessinez-vous à travers les trois pièces que vous avez choisi de mettre en regard dans ce triptyque ?
J. D. : Tout est né de Derniers remords avant l’oubli, qui a été créé en premier. Lagarce aborde un thème qui me touche particulièrement : les baby-boomers, nés après la guerre et engagés dans la révolution de 1968. Une « génération dorée » qui a connu l’arrivée de la gauche au pouvoir et la chute des utopies. Suite à cette création, j’ai imaginé une genèse et me suis amusée à construire une saga.
« Nous avons mis du temps avant de mettre des mots sur notre identité : un théâtre pauvre, des acteurs, des textes et des séances d’improvisations… »
En me demandant quel genre de mariage avait pu faire nos parents dans les années 1970, je me suis intéressée à La Noce, pièce écrite par un tout jeune homme en révolte familiale, Brecht. Après cette seconde pièce (qui est donc devenue le premier volet), il y a eu l’envie de raconter quelque chose de plus personnel, de se demander quel type de parents ils étaient devenus. Finalement, le thème du troisième volet – la transmission, développée sous forme d’un grand portrait générationnel – réunit les trois pièces. Ces trois histoires différentes, une fois cousues ensemble, n’en font plus qu’une.
Comment avez-vous élaboré Nous sommes seuls maintenant, création collective d’In Vitro ?
J. D. : Si l’improvisation a toujours nourri nos répétitions, elle est longtemps restée dans l’ombre, car nous abordions des pièces écrites. Mais elle a fait naître, chez nous, une langue. Une langue qui s’est construite parallèlement à l’écriture des auteurs que nous mettions en scène, comme une forme de réponse. Nous fantasmons les années 1970 avec La Noce, nous déchantons dans les années 1980 avec Derniers remords avant l’oubli. Nous avons eu besoin de clore la trilogie avec notre propre point de vue, en questionnant la génération d’après : la nôtre. Tant dans la forme que dans le fond, Des années 70 à nos jours renvoie ainsi à un voyage généalogique.
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
à 19h ; les dimanches 21 et 28 septembre à 15h. Tél. : 01 42 74 22 77. www.theatredelaville-paris.com. Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis. Nous sommes seuls maintenant : les 2, 3, 8, 9, 10 octobre 2014 à 20h30. Intégrale : les 4 et 11 octobre à 16h et les 5 et 12 octobre à 15h.