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"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Danse - Entretien / Thomas Lebrun

Ils n’ont rien vu de Thomas Lebrun

Ils n’ont rien vu de Thomas Lebrun - Critique sortie Danse Tours CDR de Tours – Théâtre Olympia
Thomas Lebrun Crédit : Luc Lessertisseur

Région / Tours / Théâtre Olympia /
Entretien Thomas Lebrun

Publié le 19 avril 2019 - N° 276

De La jeune fille et la mort à Trois décennies d’amour cerné, d’Avant toutes disparitions à Another look at memory, Thomas Lebrun est un chorégraphe brillant que l’effacement et la mémoire obsèdent. Avec Ils n’ont rien vu, sa prochaine création, il sonde le souvenir d’Hiroshima.

« Ils n’ont rien vu est une sorte de documentaire artistique. Il témoigne de notre vision, de notre ressenti sur Hiroshima. »

La création Ils n’ont rien vu vous a-t-elle été inspirée par Hiroshima mon amour ?

Thomas Lebrun : Oui, même si elle n’est pas une transposition du film sur le plateau. Hiroshima mon amour est un point de départ. La pièce n’a pas de rapport direct avec le scénario du film et nous n’en avons gardé qu’un extrait de dialogue assez court. Dans le film, la bombe atomique n’est jamais visible mais en permanence sous-jacente. Je souhaite que dans Ils n’ont rien vu, on sente Hiroshima mon amour sans qu’il soit vraiment présent. L’élément réellement commun au film et à la pièce est ce qui s’est passé à Hiroshima.

Comment alors traitez-vous de la catastrophe d’Hiroshima ?

T. L. : Nous avons fait une résidence de deux semaines et demi au Japon, dont une semaine à Hiroshima. Nous avons voulu aller dans la ville pour sentir quelle atmosphère il y règne aujourd’hui, rencontrer des gens, visiter son Musée du Mémorial pour la Paix dans lequel se trouvent des interviews de survivants. Nous y avons aussi pratiqué le sakura, une danse traditionnelle japonaise qui a des particularités selon les régions. Elle est assez théâtrale, colorée, et je m’en suis inspiré pour une scène de la pièce dans laquelle la nature disparaît. Il y a dans Ils n’ont rien vu plusieurs séquences, notamment un travail sur l’origami et la grue, qui est un symbole fort d’Hiroshima avec la fameuse petite fille aux mille grues – une enfant qui mourut de leucémie suite à la bombe et qui, se conformant à une légende, voulut confectionner 1000 grues de papier afin de voir son vœu de guérison exaucé -, ou un moment où c’est cette fois l’humain qui disparaît. La plasticienne japonaise Rieko Koga a confectionné pour nous un boro géant de 8 mètres sur 10, qui est le seul décor et évolue au rythme des tableaux. Un boro est un assemblage de tissus que les gens pauvres récupéraient pour se faire des vêtements, des couvertures. Finalement Ils n’ont rien vu est une sorte de documentaire artistique. Il témoigne de notre vision, de notre ressenti sur Hiroshima.

Le texte de Duras et la catastrophe qu’il évoque vous paraissent-ils toujours d’actualité ?

T. L. : Lorsque j’ai commencé à travailler sur cette pièce, on en parlait beaucoup à cause des tensions qui s’exacerbaient avec la Corée du Nord. C’est malheureusement une chose à laquelle on peut encore s’attendre. Et même s’il ne s’agit pas de bombe atomique, les guerres n’ont pas cessé dans le monde. Dans Hiroshima mon amour Marguerite Duras parle beaucoup de l’effacement de la mémoire, de la façon dont elle se déforme. Je trouve que l’on ne s’attarde pas assez aujourd’hui sur ce que nous apprend le passé.

 

Propos recueillis par Delphine Baffour

A propos de l'événement

du mardi 4 juin 2019 au vendredi 7 juin 2019
CDR de Tours – Théâtre Olympia
7 rue de Lucé, 37000 Tours

à 21h. Tél.  02 47 64 50 50. Durée : 1h30. Dans le cadre du festival Tours d'Horizons.

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