Evgeni Koroliov
Cet artiste rare sur les scènes françaises [...]
René Jacobs dirige le B’Rock Orchestra dans un superbe oratorio de Scarlatti mis en scène par Romeo Castellucci.
Inlassable défricheur de partitions, René Jacobs ressuscite à l’Opéra de Paris une œuvre rare : Il Primo omicidio. Cet oratorio d’Alessandro Scarlatti – le père de Domenico –, écrit en 1707, explore l’un des thèmes forts de l’Ancien Testament : le meurtre d’Abel par son frère Caïn. Un premier meurtre qui a suscité nombre de questions théologiques et de motifs artistiques, inspirant peintres, poètes et musiciens. Enflammée par les potentialités du sujet, la partition de Scarlatti prend les allures d’un véritable opéra : lutte de Dieu et de Lucifer dans l’âme de Caïn, portrait d’Adam et Eve, voix d’Abel descendant du ciel créent des effets saisissants, tandis que les récitatifs éloquents, les somptueuses arias et l’orchestration raffinée composent un surprenant « divertissement sacré ».
Douceur, culpabilité et religion
Après Moses und Aron, Romeo Catellucci revient à l’Opéra de Paris pour mettre en scène cette œuvre que René Jacobs avait ressuscitée au disque en 1997. Sensible à la dimension métaphysique de la partition, il trouve « extraordinaire la beauté, la douceur avec lesquelles Scarlatti traite l’homicide ». Des deux frères, « le personnage de Caïn touche le plus parce qu’il y a une dimension de culpabilité sacrée, magnifique, c’est vraiment le père de l’humanité. La religion est indépassable (…), c’est dans la fibre de notre société, je dirais encore plus aujourd’hui peut-être, dans des formes névrotiques. C’est une dimension totalement contemporaine. » On attend avec impatience ce que l’Italien provocateur va imaginer.
Isabelle Stibbe
Tél : 08 92 90 90. Durée : 2h55 avec un entracte.
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