La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

La formation théâtrale en France

Trouver sa liberté sur le plateau

Trouver sa liberté sur le plateau - Critique sortie

Publié le 10 mars 2011

Effronté gouailleur, un brin roublard, soudard métaphysique ou histrion
échevelé, Eric Elmosnino glisse d’un personnage à l’autre avec une fascinante
agilité. Depuis le conservatoire de Saint-Germain-en-Laye, puis le CNSAD, il
enchaîne les rôles. Un parcours bien rempli.

Que vous a apporté votre formation ?

Ce sont les rencontres qui, peu à peu, forment la personne, à la longue. Le
Conservatoire national permet de côtoyer des metteurs en scène et des acteurs
qui transmettent leur expérience, mais ce contexte reste évidemment très
différent d’une expérience de travail à leurs côtés. Peut-être ma formation
a-t-elle vraiment débuté lorsque Jean-Pierre Vincent, dont je suivais la classe,
m’a incité à tenter d’autres chemins que la pente naturelle vers laquelle me
poussait mon tempérament. Grâce à lui, je me suis aventuré vers des zones
inconnues, j’ai osé attaquer ce qui m’effrayait, ce qui a nourri ma pseudo
nature. J’ai aussi appris en vivant avec les gens de ma génération, en regardant
des acteurs jouer, notamment Patrick Pineau. Voir avec quelle liberté il
abordait la scène, en étant au plus près de lui-même, a débridé quelque chose en
moi. En jouant avec lui, j’ai également appris à être dans le temps présent de
la représentation, comme un animal, attentif à tout ce qui se passe autour pour
composer avec les autres, le texte et la situation.

Travailler avec les metteurs en scène a donc été déterminant ?

Certains rôles m’ont fait beaucoup avancer. Bernard Bloch par exemple fut le
premier à me proposer un personnage violent, sombre, loin de mes emplois
habituels. Je ne pensais pas pouvoir jouer ce genre de type. Cette expérience
m’a révélé des possibilités d’interprétation, des aspects de ma personnalité de
comédien que je ne soupçonnais pas. Durant quelques années, j’ai poursuivi cette
exploration de la face obscure de l’être. Se confronter à des maîtres tels
qu’André Engel ou Alain Françon donnent de l’étoffe, car ils ne laissent jamais
l’acteur tranquille. L’apprentissage se fait dans l’échange. Le désir des autres
est important pour se construire. Il faut savoir lui dire oui et l’attraper.

« Se sentir en confiance est peut-être le plus important pour un acteur, car
que ne surcharge-t-il pas son jeu pour contrer sa peur ! »

La technique est-elle importante pour vous ?

De plus en plus. Il faut savoir bouger sur un plateau et se faire entendre ?
c’est le minimum ! En fait, je n?allais pas aux cours techniques au
Conservatoire. Sans doute à tort. Etre en bonne forme physique est la première
règle pour tenir trois heures en scène. Après chacun développe ses propres
trucs. Par exemple, je ne fabrique jamais exactement la même musique d’un soir à
l’autre. Je traverse chaque fois le texte différemment, même si cette différence
reste imperceptible au regard extérieur. Chacun affronte sa peur comme il peut,
certains en cherchant la parfaite maîtrise, d’autres en laissant venir. Au fond,
se sentir en confiance est peut-être le plus important pour un acteur, car que
ne surcharge-t-il pas son jeu pour contrer sa peur ! Finalement, l’essentiel
pour lui est de trouver sa liberté sur le plateau, de faire des choix qui vont
le construire.

Entretien réalisé par Gwénola David

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